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Black History, Black Futures avec Mervyn Allen et Dennis Mitchell

Mar 2, 2023 Balados Lecture de 18 min

McMillan est heureux de présenter le balado Black History, Black Futures pour souligner le Mois de l’histoire des Noirs. Chaque épisode propose un entretien entre un.e avocat.e de McMillan et une pionnière ou un pionnier Noir du milieu des affaires canadien.

Dans l’épisode d’aujourd’hui, Mervyn Allen, associé, coprésident du groupe Immobilier commercial et président du groupe Location immobilière de notre cabinet, s’entretient avec Dennis Mitchell, directeur général et chef des placements à Starlight Capital, une filiale indépendante de gestion d’actifs de Starlight Investments, au sujet du leadership et de la diversité comme moteurs d’une entreprise.


Transcription [traduction]

Mervyn Allen : Bonjour à tous et à toutes. Voici le deuxième épisode de notre balado consacré au Mois de l’histoire des Noirs, une série de causeries mettant en vedette des pionnières et pionniers Noirs du milieu des affaires canadien.

Merci de vous joindre à nous aujourd’hui. Je m’appelle Mervyn Allen, et je suis associé, Immobilier commercial chez McMillan.

Comptant parmi les plus grands cabinets de droit des affaires au Canada, nous avons le privilège de collaborer, partout au pays, avec des sociétés et des entreprises visionnaires qui partagent nos valeurs et notre attachement à la diversité et à l’inclusion. Je tiens à vous dire, au nom du cabinet et de mes collègues du Groupe d’affinités des avocat.e.s. noir.e.s, que nous sommes ravis d’accueillir pour cet épisode Dennis Mitchell, directeur général et chef des placements à Starlight Capital, un grand nom du placement immobilier et de la gestion d’actifs à l’échelle nationale.

Bienvenue, Dennis, et merci d’être des nôtres pour une discussion qui sera certainement très éclairante!

Dennis Mitchell : C’est moi qui vous remercie de m’accueillir, Mervyn.

Mervyn Allen : Entrons tout de suite dans le vif du sujet. Vous êtes directeur général et chef des placements à Starlight Capital depuis 2018, c’est bien cela?

Dennis Mitchell : Oui, chef des placements. Nos activités ont débuté en mars 2018. Nous sommes une modeste filiale de Starlight Investments, un cabinet présent partout en Amérique du Nord qui gère 28 milliards de dollars d’actifs immobiliers. Starlight Capital se distingue des autres gestionnaires d’actifs, mais aussi de sa société mère, par l’accent mis sur les trois marchés verticaux que sont l’immobilier, les infrastructures et les actions diversifiées et par l’offre de placements ouverts et fermés sur ces marchés. Comme vous le savez, j’ai l’honneur et le plaisir d’avoir des collègues que je connais depuis quarante ans et, dans bien des cas, de bâtir avec eux un cabinet depuis plus d’une décennie. C’est une véritable passion. J’adore gérer des actifs et bâtir des entreprises. Nous avons assemblé une équipe formidable et diversifiée qui aime mettre des choses en place et voir son travail porter fruit.

Mervyn Allen : Vous savez, mes parents – je pense surtout à mon père – ont décidé il y a longtemps quelles écoles je fréquenterais et quelle profession j’exercerais.

Pourriez-vous nous dire ce qui vous a amené à vouloir faire carrière en finance, et plus particulièrement en gestion d’actifs?

Dennis Mitchell : Avec plaisir. En passant, je fais exactement la même chose avec mes enfants, pour qu’ils n’aient pas le choix [rires]. Cela dit, jeune, j’étais absolument certain que je gagnerais ma vie comme footballeur professionnel. Six opérations au genou plus tard, j’ai dû trouver une autre idée. Je me souviens très bien d’avoir vu passer un article sur les salaires des chefs de la direction des banques, publié par un quotidien national. C’est à ce moment que je me suis dit : voilà comment devenir riche, et voilà le style de vie qui m’intéresse! Les services financiers ont toujours suscité ma curiosité, mais c’est la lecture d’un ouvrage intitulé Buffetology qui m’a mis résolument sur ce chemin, qui m’a convaincu de viser une carrière dans la finance ou les services financiers.

Mervyn Allen : Warren Buffett.

Dennis Mitchell : Absolument. Je ne peux pas vraiment qualifier Warren Buffett de mentor, puisque je ne l’ai jamais rencontré. Il ne retourne pas mes rappels [rires]. Je peux cependant vous dire qu’il m’a beaucoup inspiré sur le plan professionnel. Vous savez, au fil des ans, l’idée d’avoir la chance de se rendre à Omaha pour assister à l’assemblée générale annuelle… on raconte souvent que c’est comme aller à l’église. Je vous explique. Cette expérience – à peu près tout le monde en convient – renouvelle réellement la foi et la confiance en ce qu’on fait. Cet homme montre l’exemple, et c’est pareil pour certains des gens avec qui j’ai eu la chance de travailler. Les parallèles entre le sport professionnel et la gestion d’actifs sont nombreux. Il y a l’aspect compétitif. Il y a aussi la capacité de se démarquer en imaginant des systèmes ou des structures. C’était très attirant pour moi. J’aimais aussi la possibilité d’avoir un apport dans la vie des Canadiennes et Canadiens ordinaires. Depuis plus de 20 ans, les résultats sont extraordinaires… et ce n’est qu’un début!

Mervyn Allen : Comment en êtes-vous venu à vous joindre à Starlight? Voudriez-vous nous en glisser un mot?

Dennis Mitchell : Absolument. L’une des personnes les plus inspirantes qu’il m’ait été donné de côtoyer dans ma carrière en services financiers s’appelle Daniel Dreamer, qui assure la direction générale de notre société mère, Starlight Investments. J’ai fait sa rencontre en 2010 et, ensemble, nous avons mené à bien un certain nombre de transactions couronnées de succès. Nous avons gardé le contact. À un certain moment dans ma carrière, me trouvant à la croisée des chemins, j’ai décidé de dresser la liste des personnes les plus riches et les plus intelligentes que je connaissais et de leur vendre l’idée de ce qui est aujourd’hui Starlight Capital. Daniel figurait au sommet de cette liste, et je me suis attelé à le convaincre. J’aimerais vous dire qu’il a tout de suite adhéré au projet, mais la vérité, c’est qu’il a vu le potentiel de notre idée et qu’il a complété le tout. Notre partenariat est extrêmement fructueux. C’est un excellent mentor. Une source d’inspiration. Il nous a beaucoup donné, et je dis nous parce que notre équipe compte actuellement 27 membres, qui collaborent en bonne partie depuis plus d’une décennie. Grâce à lui, nous avons pu concrétiser une ambition professionnelle de longue date. L’ambition de chacun et chacune et nos réussites collectives ont joué, mais moins que la découverte par Daniel d’avenues permettant de faire progresser le cabinet de gestion d’actifs que nous avions fondé.

Mervyn Allen : C’est tout à fait fascinant! Vous m’apprenez bien des choses.

Selon vous, en quoi votre début de carrière a-t-il façonné votre approche comme leader?

Dennis Mitchell : Pour résumer mon approche comme leader, je dirais que je suis celui qui se penche toujours sur ce que les autres tiennent pour acquis. Quand on imagine un projet d’entreprise, on pense aux chiffres. Il faut de bons résultats. Un service à la clientèle adéquat ou plus qu’adéquat. Une vision, aussi, n’est-ce pas? Quand on parle de ce qui fait l’excellence d’une entreprise, qu’elle soit cotée en bourse ou non, ce qui ressort toujours pour Starlight Capital, c’est le leadership. À mes yeux, l’instinct de base du leader, c’est d’être prêt à faire ce qu’il attend de son équipe. Le leader montre l’exemple. Il donne le ton et démontre, par ses faits et gestes, qu’il ne rechigne pas à faire ce qu’il demande aux autres. Je crois que c’est ce qui distingue les leaders de qualité des personnes qui sont cadres sans faire preuve de leadership. En ce qui me concerne, le sport professionnel y est pour beaucoup. Il faut absolument prêcher par l’exemple. Montrer à son équipe qu’on mérite son titre de leader, qu’on est vraiment une personne rassembleuse. Je reviens au domaine sportif. Prenons le football, par exemple. Le quart-arrière est capitaine de son équipe, c’est presque inévitable. Une équipe de football ne peut réussir que si le poste le plus important sur le terrain est occupé par un véritable leader. Une personne capable d’inspirer son équipe, de la guider lorsque la partie, voire la saison, est littéralement en jeu. Cette personne qui sait que son équipe réussira et qui fera tout en son pouvoir pour l’aider à atteindre ses objectifs.

Soyons francs, la réalité n’est pas aussi spectaculaire dans le domaine des services financiers, mais il demeure que l’équipe cherche un leader qui donne le ton. Les membres de l’équipe s’attendent à ce que le leader fasse lui-même ce qu’il attend d’eux. C’est ce qui constitue pour moi l’essence du leadership, et c’est ce que j’ai toujours tenté d’incarner. D’aussi loin que je me souvienne, je regarde ce que font les leaders du milieu des affaires, du domaine sportif et du monde du spectacle pour déterminer ce que j’ai à faire.

Mervyn Allen : Sans compter que lorsque les choses vont mal, il est essentiel de faire preuve de leadership pour redresser la situation.

Dennis Mitchell : Oui, c’est certain. Vous savez, au cours de mes vingt ans de carrière dans les services financiers, j’ai dû composer avec la crise financière, le Brexit, la COVID. Les choses se déroulent rarement comme prévu. À preuve, si vous voulez rire un bon coup, allez relire les prévisions de l’année précédente pour les marchés et les taux d’intérêt. C’est toujours amusant de constater que rien ne s’est passé comme l’avaient prévu les experts. Mais tout ça, ça fait partie du jeu. Si la vie était une voie toute tracée d’avance, sans virage ni embranchement, on trouverait le temps long. Dans le monde des affaires, il y a une multitude de virages, de détours et d’événements imprévus qui surviennent sans cesse et exigent une action de notre part, une solution. C’est justement ce qui me distingue des gens qui adorent dire qu’ils font partie du milieu des affaires, mais qui ne cherchent pas vraiment à trouver des solutions aux problèmes, à faire avancer les choses, à se surpasser et à créer de la nouveauté. Moi, c’est ce qui me fait vibrer.

Ceci dit, je ne peux pas dire que j’ai hâte à la prochaine pandémie ou à la prochaine crise financière, mais je suis persuadé que Starlight Capital a ce qu’il faut pour passer au travers.

Mervyn Allen : Excellent. Comme il s’agit d’un balado lié au Mois de l’histoire des Noirs, mes prochaines questions vont porter sur ce sujet. De nombreuses grandes entreprises, particulièrement aux États-Unis, ont essayé par divers moyens, et avec plus ou moins de succès, de diversifier leur équipe de direction et de favoriser l’inclusion chez les conseillers professionnels. Quelle est votre expérience par rapport à la diversité et, plus particulièrement, à l’inclusion des personnes Noires dans le secteur financier? Avez-vous constaté une évolution?

Dennis Mitchell : Oui. Je réponds d’abord à votre deuxième question. C’est évident qu’il y a eu une évolution. Je vois une amélioration, en ce qui a trait à la tendance mais aussi aux moyens. Il y a de plus en plus de diversité. C’est plutôt l’inclusion qu’il reste à améliorer. Mais, on constate de plus en plus de progrès. On tend à remarquer les accrocs, les erreurs ou les reculs importants, mais je crois que nous allons dans la bonne direction.

Pour revenir à la première question, j’essaie toujours de m’en tenir à l’essentiel. Pourquoi faisons-nous cela? La réponse comprend deux volets. En fait, c’est la meilleure chose à faire. Si nous sommes réellement une société juste et démocratique, alors tout le monde devrait avoir des chances égales de pouvoir développer son plein potentiel.

Mais pour ceux qui aimeraient avoir une réponse plus simple, vous savez qu’une foule d’études démontrent qu’une main-d’œuvre diversifiée génère de meilleurs rendements économiques pour les entreprises, n’est-ce pas? Qu’il s’agisse de la diversité des genres ou de la diversité ethnique ou raciale, la littérature montre clairement et de façon empirique que les entreprises qui font un effort conscient de diversité obtiennent de meilleurs résultats. Vous savez, j’aborde la diversité comme je le ferais pour la gestion de portefeuille. Prenez par exemple le concept de diversification associé aux titres inscrits à la bourse. Jusqu’à un certain point, plus vos titres sont diversifiés, plus vous pouvez augmenter votre rendement avec le même niveau de risque et de volatilité. Alors, si l’on applique le même concept à la main-d’œuvre, plus les employés proviennent d’une grande diversité de milieux, plus ils ont un bagage diversifié, et surtout, plus leurs habiletés ou leur cheminement cognitifs sont différents, plus l’entreprise sera en mesure de générer des solutions optimales, n’est-ce pas? Si vous faites seulement appel à un petit groupe de personnes partageant la même expérience de vie, je ne crois pas que cette équipe sera en mesure de surpasser une équipe diversifiée sur le plan de la cognition et du vécu pour vous fournir des solutions et vous aider à prendre des décisions. Donc, sur le plan économique tout comme sur le plan moral, la diversité est une stratégie gagnante. Si ces deux arguments ne parviennent pas à vous convaincre, alors vous devriez vous demander quels sont vos motifs et ce que vous essayez de créer ou de bâtir.

Mervyn Allen : Alors d’une certaine façon, nous prêchons à des convertis. Selon vous, les sociétés doivent-elles jouer un rôle dans cette transformation des perceptions sociales sur le sujet?

Dennis Mitchell : Tout à fait, parce que lorsque l’on parle de sociétés, les gens pensent tout de suite à ces espèces de personnages sans nom. Mais les sociétés sont des regroupements de personnes. Alors, est-ce que les sociétés et les personnes derrière le voile corporatif qui ont les ressources, les capacités et les plateformes – est-ce qu’elles ont une responsabilité? Absolument. Bon nombre d’entre elles ont considérablement profité du travail des autres dans le monde des affaires pour réaliser leurs propres objectifs. N’oublions pas aussi tous ceux d’entre nous qui avons contribué à l’édification de cette société canadienne où nous aimons vivre, et moi-même, à titre de gestionnaire de portefeuille mondial, qui ai l’occasion de voyager un peu partout dans le monde, en particulier dans les pays développés. Je peux vous dire, chaque fois que je rentre au bercail, je me répète que c’est le meilleur endroit au monde où vivre. Et les gens qui racontent que les États-Unis sont le pays le plus puissant de la planète… Je suis heureux de leur reconnaître cet avantage, certes. Les gens vont vous parler de la qualité de vie des pays nordiques, grand bien leur fasse. Mais si je tiens compte de la somme de tous les éléments – perspectives, sûreté, sécurité – même de l’aspect géographique, de l’emplacement du Canada, personne ici ne peut trouver à redire. C’est un exploit auquel les États-Unis ne sont jamais parvenus. Je vois la situation dans son ensemble et pour moi, le Canada est un endroit formidable où il fait bon vivre. Je ne me vois vivre nulle part ailleurs. Et c’est ainsi que les sociétés et leurs dirigeants profitent de cette situation. Et donc, si vous vous préoccupez réellement non seulement de vos résultats financiers, mais aussi de votre contribution à la société dans son ensemble, si vous souhaitez ajouter votre pierre à l’édification d’un monde plus juste… Alors oui, vous avez l’obligation de poursuivre vos efforts au soutien de la diversité et de l’inclusion. Vous avez une obligation – je dirais une obligation positive – d’agir et de devenir une force dynamique qui induit le changement et favorise l’inclusivité.

Mervyn Allen : Question suivante : comment pensez-vous que le secteur, notre secteur, évoluera sur le plan des perspectives de recrutement des professionnel.le.s Noir.e.s? Commençons par ça.

Dennis Mitchell : La réponse est loin d’être simple parce que les entreprises affirment qu’elles ne savent pas où trouver des professionnel.le.s Noir.e.s. Et nous allons parler un peu du Fonds de prospérité pour l’avancement des communautés noires dans un moment, mais je ne veux pas précipiter les choses. La difficulté, ce n’est pas tant de trouver des personnes Noires talentueuses, motivées et désireuses d’accepter un emploi. Le problème, c’est que les entreprises ont souvent pour dogme de ne « recruter que des diplômés des meilleures facultés », et ces quatre ou cinq facultés ont une population étudiante plus ou moins homogène. Et on se retrouve dans un cycle de « Je ne recrute que des diplômés des meilleures facultés », puis tous les candidats recrutés recommandent d’autres personnes ayant fréquenté ces facultés. On obtient ainsi un bassin de candidats très étroit. Alors quand les entreprises disent « Nous aimerions engager davantage de professionnel.le.s Noir.e.s, mais nous ne savons pas où les trouver », qu’elles commencent par revoir leur façon de recruter et d’attirer les gens. Et je trouve que, si vous faites abstraction des quatre ou cinq facultés dont les diplômés sont les plus recherchés, et si vous ouvrez vos perspectives pour découvrir de nouveaux candidats diplômés d’autres facultés ou accessibles autrement, vous verrez que la question de la diversité se réglera d’elle-même. Vous savez, chez Starlight Capital, nous sommes hautement diversifiés. Nous sommes vingt-sept, mais notre équipe est formidablement intersectionnelle et diversifiée. Et je ne peux pas dire qu’il y a eu un effort conscient, par exemple « Nous avons besoin de représentation ici, ou de représentation là ». Nous avons simplement dit : « Nous allons exploiter notre réseau. Nous allons ouvrir les portes et dire “Quelles sont les personnes que nous connaissons, ou avec lesquelles nous avons eu une expérience, et que nous aimerions accueillir à Starlight Capital?” ». Et voilà, nous avons fini par former un groupe de personnes très diversifié. Et aujourd’hui, les membres du groupe recommandent à leur tour de plus en plus de personnes. Et la richesse de notre diversité ne cesse de fructifier.

Mervyn Allen : Alors, peut-être pouvez-vous nous éclairer sur ce point, puisque ça semble très bien fonctionner chez Starlight. Nous avons ouvert la porte à de bon.ne.s professionnel.le.s Noir.e.s, que doit-on faire pour la rétention, puis les promotions?

Dennis Mitchell : Les gens restent lorsqu’ils se sentent valorisés et qu’ils ont des perspectives d’avenir.

Alors commençons par votre société, et si vous avez été assez éclairés et conscients pour adopter la valeur de la diversité et de l’inclusion et l’intégrer à votre cabinet, alors vous êtes probablement assez éclairés, conscients et visionnaires pour avoir établi une stratégie pour votre entreprise qui ne s’arrête pas à la simple diversité, au produit et aux prix, à la répartition géographique, etc. Les gens qui prennent des décisions mûrement réfléchies et qui ont un plan et une stratégie pour faire progresser leur entreprise sont aussi réceptifs aux bonnes idées lorsqu’elles concernent la gestion de leur effectif et de leur équipe. Les gens sont attirés par les entreprises qui ont un plan et une croissance à la clé. Vous commencez par là, et puis les gens veulent rester où ils se sentent valorisés. Alors, tenter en toute bonne foi de créer un effectif diversifié, mais aussi créer des espaces inclusifs où les gens peuvent – vous savez, je ne veux pas utiliser trop de jargon. Mais quand je dis que je peux me présenter tel que je suis, je veux dire que je ne suis pas obligé de faire attention au fait que je suis la seule personne Noire dans la salle ni obligé de représenter toute la race Noire. Ça n’a aucune importance si j’ai un héritage jamaïcain et que je suis né au Canada, je dois représenter les personnes nées en Haïti qui sont à Montréal et sont francophones. Je dois représenter les personnes qui sont nées au Congo et vivent à Edmonton. C’est un peu ridicule, vous ne trouvez pas? On ne demanderait jamais une telle chose à des personnes d’une autre race, n’est-ce pas? Mais en ayant cet espace inclusif, j’ai la liberté d’être simplement Dennis, je ne suis pas obligé de représenter une race entière et un groupe entier de personnes qui sont tout sauf monolithiques.

Cela signifie qu’en plus de reconnaître les fêtes traditionnelles que vous reconnaissez, certaines que je pourrais reconnaître me donnent l’impression de pouvoir effectivement mettre de l’avant quelques aspects de mon héritage, de ma culture, de moi-même en tant que personne dans mon milieu de travail. Ce qui signifie que mon milieu de travail me semble plus attirant. Les gens m’ont souvent demandé « Comment se sent-on quand on est une personne Noire sur Bay Street? » et je lève les yeux au ciel, mais moins qu’avant. Je leur réponds simplement que c’est épuisant. C’est épuisant parce que vous devez être conscient en permanence du fait que nous sommes peu nombreux et que pour cette raison, nous devons constamment représenter l’ensemble des communautés. J’entends encore ma mère me donner la leçon et me dire que je devais toujours agir comme un bon représentant et donner le bon exemple. Et c’est valable non seulement pour la famille. C’est valable aussi, lorsque vous arrivez à Bay Street, pour toutes les personnes Noires. Alors c’est épuisant. Mais il faut bien reconnaître que rares sont ceux qui ont un passe-droit, n’est-ce pas? Chacun a ses difficultés. Chacun connaît l’adversité. Chacun doit surmonter ses défis. Quant à moi, l’un des aspects qui m’ont créé le plus d’obstacles et de difficultés est le fait que je suis Noir. Mais combien de personnes blanches vous diront, « Regarde, je n’ai obtenu aucun passe-droit simplement parce que je suis Blanc.he, je dois composer avec toutes ces choses, vois-tu? ». Cela démontre que même si parfois, cela peut sembler personnel, en réalité, le monde n’est pas un milieu personnel. Le monde est très impersonnel. Les difficultés que vous éprouvez et les obstacles que vous devez surmonter peuvent vous sembler personnels, mais en réalité, c’est la vie tout simplement. En tant que professionnel Noir, je dois composer avec le fait que je suis le seul et unique homme Noir sur Bay Street, ce qui représente certains défis pour moi. Mais si nous élargissons notre réseau, si nous nous exprimons davantage, notre fardeau deviendra plus facile à porter. Et si nous faisons nôtre le véritable principe de l’inclusivité, notre fardeau s’en trouvera allégé. Si vous arrivez à un point où chacun sait qu’il a les mêmes chances de réussite que les autres, alors c’est la perfection. Peut-être ne va-t-on jamais en arriver là. Mais les efforts pour y parvenir et les avancées en valent amplement la peine.

Mervyn Allen : Absolument. Très bien dit. Passons à une cause qui vous tient à cœur : le Fonds de prospérité pour l’avancement des communautés noires. Parlez-nous-en.

Dennis Mitchell : Absolument. On parle beaucoup depuis, vous savez, George Floyd. Je tiens seulement à le rappeler; par contre, nous ne répéterons pas la litanie des noms. Cela dit, en très peu de temps, George Floyd a été brutalement tué. Ahmaud Arbery s’est fait chasser et tuer, et Breonna Taylor a été massacrée dans sa propre maison.

Mervyn Allen : Et dernièrement, Tyre Nichols.

Dennis Mitchell : Tyre Nichols. Oui. Je crois que ce qui a changé dans cette courte période est qu’il est rendu impossible d’ignorer le fait que ces crimes horribles ont été commis à l’égard de personnes qui ne méritaient ce genre de traitement. Les personnes Noires en Amérique du Nord, en Europe et ailleurs dans le monde le savent depuis toujours. Maintenant, c’est devenu évident pour le reste du monde. Vous vous rappelez sûrement les manifestations qui ont suivi le meurtre de George Floyd en Europe et en Asie. C’est le reste du monde, je pense. Les personnes qui ne sont pas Noires ont commencé à dire : « Non. Ça ne peut pas continuer comme ça. » Ça a ouvert la voie aux personnes non Noires pour dire : « Qu’est-ce qu’on peut faire pour changer ça? » Une chose que j’ai toujours voulu faire – et je ne peux pas m’en attribuer tout le mérite parce que nous étions 51 à le faire – était de constituer le Fonds de prospérité pour l’avancement des communautés noires en 2020. Nous nous disions : « Nous avons l’argent, le talent, l’expertise et la motivation. Le moment est venu est passer à l’action. Il faut agir pour corriger la situation. »

Mervyn Allen : Ne jamais gaspiller une bonne crise.

Dennis Mitchell : Absolument. Nous nous sommes réunis. Et nous avons fondé le Fonds de prospérité pour l’avancement des communautés noires, et l’avons nommé ainsi parce que le racisme est une barrière aux possibilités. Nous voulions faire tomber ces obstacles. Et là je vais susciter la controverse, mais nous ne visons pas du tout à mettre fin au racisme. Ça peut sembler étrange, mais le racisme est une idée issue de l’ignorance. Et bonne chance si vous voulez éradiquer une idée. Plus important encore, le Fonds est axé sur les actions et les résultats. Nous visons à ouvrir les possibilités dont le racisme prive les personnes Noires. Au fil du temps, à mesure que le Fonds croît et que sa portée s’élargit, nous ferons du racisme un phénomène de plus en plus marginal, et nous nous efforcerons d’en éliminer les effets. C’est le parcours qui compte. Les progrès.

Rappelons que nous avons fondé l’organisme il y a quelques années. L’objectif du Fonds est de faire le lien entre les entreprises, les autorités et les philanthropes pour mobiliser plus de capitaux pour la communauté Noire, que le Fonds verse ensuite aux entreprises Noires sous forme de prêts : investissements dans des entreprises Noires et subventions à des organismes de bienfaisance pour leur permettre de poursuivre leur mission. Il y a beaucoup d’organismes Noirs qui travaillent pour le bien de la communauté. Par contre, la constante nécessité de tenir des collectes de fonds les empêche de remplir leur mission. J’espère que le partenariat avec le Fonds de prospérité pour l’avancement des communautés noires permettra à ces organismes de concentrer leurs efforts sur leurs actions et leurs effets en les libérant du fardeau de mobiliser des capitaux.

Je terminerai en disant que tous les Canadiens en récolteront des bénéfices. Imaginez un monde où Jeff Bezos, Bill Gates et Elon Musk auraient été écartés du domaine des technos parce qu’ils sont des hommes cisgenres blancs. Le recul généralisé du niveau de vie serait très marqué, non? Les retombées de leurs créations, technologies et entreprises ne se sont pas limitées aux hommes cisgenres blancs, tout le monde en a profité. Donc, si nous pouvons créer un monde où les personnes Noires ont des possibilités comparables, la communauté Noire ne sera pas la seule à en profiter. Tout le monde, Canadiens et le reste de l’humanité, bénéficiera des innovations qui sont à la veille d’émerger. C’est le plus important; il y a beaucoup de gens qui disent : « Voilà ce que je suis, ce que je fais, où sont mes capitaux? Où est mon fonds de prospérité? » Il y a des limites à ce que mes partenaires, le Fonds et moi pouvons faire. L’important est d’agir, d’avoir des retombées tangibles et de persévérer. J’espère vivement que dans 20 ou 30 ans le Fonds de prospérité pour l’avancement des communautés noires deviendra un pilier et que mes petits-enfants pourront compter dessus. C’est l’objectif ultime.

Mervyn Allen : Il faudrait causer de ça la prochaine fois.

Dennis Mitchell : Quand vous voulez.

Mervyn Allen : Absolument. Il va falloir faire quelque chose pour ça. Quel est le meilleur conseil que vous ayez jamais reçu, et l’avez-vous suivi? [rires]

Dennis Mitchell : On m’a donné beaucoup de conseils au fil du temps. Je ne sais pas vraiment s’il y en a un qui sort du lot; par contre, voici l’une de mes règles de vie : toujours avoir un plan. En effet, soit vous exécutez votre plan ou vous contribuez à celui d’un d’autre, et votre rôle dans celui-ci pourrait vous déplaire. Donc, ayez un plan. Et révisez-le. Il va de soi que le plan qu’on avait à 12 ans n’est pas le même qu’à 60 ans, n’est-ce pas? Pour ma part, mes plans ont certainement changé au fil du temps. Cela dit, il vous faut un plan : on n’a qu’une vie, et elle passe tellement vite! Je n’ai pas encore rencontré Benjamin Button, qui a commencé sa vie avec le fruit de son expérience et a pu l’appliquer quand il était jeune. Tirez le maximum de ce que vous faites. Donc, ayez un plan, mais aussi votre propre conseil d’administration. Rappelons que les sociétés ont un conseil qui oriente leurs activités et les administre. Constituez le conseil de Moi et cie. Les gens qui savent ce qu’ils font peuvent vous donner des conseils réellement pertinents et utiles. D’ailleurs, à l’instar du conseil d’une société, le vôtre peut aussi évoluer. Consultez-le quand vous avez des décisions importantes à prendre. Comme vous le savez, je gagne mon pain avec la vérification diligente. Ce n’est pas seulement le conseil qui compte, c’est aussi celui ou celle qui le donne et ce qui lui tient à cœur. Constituez votre conseil et modifiez sa composition au fil de l’évolution de vos besoins et en fonction de la capacité des membres de vous aider. Accordez-vous de la bienveillance. Je suis prêt à parier qu’entre 60 % et 70 % de notre discours interne est négatif. Vous êtes la seule personne avec qui vous vivez toute votre vie; même les amis, les conjoints et les enfants finissent par partir. Accordez-vous de la bienveillance. Soyez gentil à votre égard. Soyez aussi bienveillant à votre égard que vous l’êtes à l’égard des autres, et aussi motivé à profiter de bons moments que vous l’êtes pour les autres. C’est le meilleur type de mantra, celui qui est distillé de tous les conseils que j’ai reçus au fil de ma carrière. Donc, voici ce qu’il faut : un plan, un conseil et de la bienveillance.

Mervyn Allen : Voilà un bon conseil. Une dernière question pour vous, Dennis. Moi je rêve encore d’écrire un grand roman ou peut-être un grand scénario. Vous, à part diriger une société de premier ordre, y a-t-il autre chose qui vous anime?

Dennis Mitchell : Au risque de faire un peu fleur bleue, mes enfants. On parle beaucoup de legs, ce qu’on laisse derrière. Par exemple, les Warriors de Golden State. Quel legs laissent-ils? Sont-ils meilleurs que les Bulls de 1996-1997? En fin de compte, tout ça s’évanouit avec le temps. Ce sont mes enfants qui me motivent, notamment à être une bonne personne. Ils me gardent sur le droit chemin et sont le sel de ma vie. Comment ne pas être rempli de fierté à voir nos enfants prendre leurs propres décisions et reprendre certaines de nos habitudes? On leur parle. En général, je suis convaincu que les enfants sont programmés pour ne pas écouter leurs parents parce que s’ils le faisaient, l’humanité stagnerait et décrépirait : plus personne ne repousserait les limites et n’innoverait. Ils sont programmés pour nous ignorer. Il n’en reste pas moins qu’il y a toujours de moments où vous vous rendez compte qu’ils ont retenu certains de vos conseils et qu’ils les appliquent. Il n’y a rien de mieux que ça. Quand ça arrive, ça me motive encore plus à donner le bon exemple et à donner de bons conseils. Alors oui, mes enfants.

Mervyn Allen : Fantastique! Et sur ce, nous sommes arrivés au terme de notre échange. Ce fut un plaisir de m’entretenir avec vous. L’entretien a été des plus instructifs et intéressants; j’espère que nous pourrons poursuivre la discussion.

Dennis Mitchell : Absolument. Merci de m’avoir accueilli. Je tiens à remercier McMillan de cette opportunité. J’espère que vous continuerez cette série. Je serai très heureux de vous aider si je peux.

Mervyn Allen : Revenez l’an prochain.

Dennis Mitchell : Avec plaisir.

Mervyn Allen : Merci à tous les auditeurs. Dennis Mitchell, Starlight Capital, merci beaucoup.

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