Calcul de la SSUC : le sens à attribuer à « congé payé » laisse des questions sans réponse
Calcul de la SSUC : le sens à attribuer à « congé payé » laisse des questions sans réponse
La Subvention salariale d’urgence du Canada (la « SSUC ») offre aux employeurs admissibles la possibilité de toucher une subvention de base pouvant aller jusqu’à 75 % des salaires admissibles versés aux employés admissibles[1].
Dans le cadre de la SSUC, les employeurs ayant des employés admissibles en « congé payé » pourraient demander une subvention bonifiée d’un montant équivalant aux cotisations patronales versées en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi (Canada) ainsi qu’aux cotisations patronales au Régime de pensions du Canada, à certains régimes de pensions provinciaux et au Régime québécois d’assurance parentale.
Selon l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »), un employé qui est rémunéré par son employeur sans accomplir aucun travail pendant la période de paie en cause est considéré comme étant en « congé payé »[2]. Toutefois, l’ARC est muette sur les circonstances dans lesquelles un employé peut légitimement être considéré comme étant en « congé payé » pour l’application de la SSUC.
Le terme « congé payé » n’est pas expressément défini dans la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) (la « LRI ») ou toute autre loi fédérale. Toutefois, certaines dispositions du Code canadien du travail (le « Code ») pourraient orienter l’interprétation.
En effet, le Code fait référence à des congés payés pris dans différents contextes. Le point commun qui les relie est qu’ils consistent en une période d’absence du travail déterminée, occasionnée par des circonstances indépendantes de la volonté de l’employé, durant laquelle celui-ci continue de toucher son salaire habituel. Par exemple, le Code mentionne explicitement un certain nombre de circonstances dans lesquelles un employé peut prendre un congé personnel, notamment : (i) soigner sa maladie ou sa blessure, (ii) s’acquitter d’obligations relatives à la santé de tout membre de sa famille ou aux soins à lui fournir, (iii) s’acquitter d’obligations relatives à l’éducation de tout membre de sa famille qui est à sa charge, (iv) gérer toute situation urgente le concernant ou concernant un membre de sa famille[3]. Tous les employés sous réglementation fédérale ont droit à cinq jours de congé personnel par année, dont trois rémunérés pour les employés qui comptent au moins trois mois de service.
Selon la Cour suprême du Canada, le libellé de la LIR doit être interprété selon une approche contextuelle, textuelle et téléologique[4]. De ce fait, on pourrait avancer que le terme « congé payé », tel qu’il est utilisé dans la loi donnant effet à la SSUC, devrait être interprété de manière téléologique de telle sorte qu’il englobe les circonstances dans lesquelles un employé cesse temporairement de travailler pour des raisons indépendantes de sa volonté, mais continue d’être payé. Par exemple, dans le contexte de la SSUC, « congé payé » pourrait s’appliquer aux employés qui ne peuvent aller travailler en raison de la fermeture obligatoire de toutes les entreprises non essentielles, d’un décret d’auto-isolement obligatoire pour les personnes ayant voyagé récemment ou d’une mise en quarantaine volontaire à la suite d’un contact avec une personne atteinte de la COVID-19. Cette interprétation est cohérente avec l’un des objectifs apparents de la SSUC : aider les employeurs à continuer de rémunérer leurs employés.
En l’absence d’une orientation supplémentaire du gouvernement, nous espérons que l’ARC administrera la SSUC dans une optique téléologique, sans tenter de définir le concept de « congé payé » d’une manière contraire aux intentions du programme.
par Michael Friedman, Kyle Lambert et Maressa Singh, étudiante en droit
[1] Pour de plus amples renseignements sur la SSUC, veuillez consulter l’article « La Subvention salariale d’urgence du Canada : aide supplémentaire en vue » <https://www.mcmillan.ca/La-Subvention-salariale-d-urgence-du-Canada-aide-supplementaire-en-vue>.
[2] Gouvernement du Canada, « Subvention salariale d’urgence du Canada (SSUC) : Calculez votre montant de subvention » (21 avril 2020) <https://www.canada.ca/fr/agence-revenu/services/subvention/subvention-salariale-urgence/ssuc-calculez-montant-subvention.html>.
[3] Code canadien du travail, alinéas 206.6(1)a) à d)
[4] Hypothèques Trustco Canada c. Canada [2005] 2 RCS 601, para 11, 259 DLR (4th) 193.
Mise en garde
Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder entièrement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt consulter ses propres conseillers juridiques.
© McMillan S.E.N.C.R.L., s.r.l. 2020
Perspectives (5 Posts)Voir Plus
Considérations juridiques au Canada liées au « clonage de la voix »
Dans ce bulletin, nous examinons quelques causes d’action possible au Canada pour une personne victime de clonage de la voix.
Analyse des contrats de partenariat prévus par le projet de loi 62 sur les infrastructures publiques au Québec
Le projet de loi n° 62, Loi visant principalement à diversifier les stratégies d’acquisition des organismes publics et à leur offrir davantage d’agilité dans la réalisation de leurs projets d’infrastructure (« projet de loi 62 ») a été adopté en octobre 2024 par l’Assemblée nationale du Québec.
La réforme de la lutte contre le blanchiment d’argent et les sanctions au Canada deviennent sérieuses : ajout de joueurs, de règles et de renseignements à déclarer
La réforme de la lutte contre le blanchiment d’argent au Canada devient sérieuse : ajout de joueurs, de règles et de détails à déclarer.
Alerte à l’intention des conseillers : ce que les conseillers inscrits doivent savoir sur le règlement 93-101 sur la conduite commerciale en dérivés
Le Règlement 93-101 sur la conduite commerciale en dérivés crée un cadre exhaustif pour la conduite des courtiers et des conseillers sur le marché des dérivés de gré à gré.
Quoi de neuf dans les questions fréquemment posées : orientations récentes du bureau de la concurrence sur les modifications apportées à la Loi sur la concurrence du Canada
Commentaire sur les Questions fréquemment posées du Bureau de la concurrence décrivant la manière dont le Bureau appliquera les dispositions modifiées de la Loi sur la concurrence relatives aux fusions et aux comportements susceptibles d’examen.
Recevez des mises à jour directement dans votre boîte de réception. Vous pouvez vous désabonner en tout temps.