


Changements significatifs en vue à la Loi sur la concurrence du Canada
Changements significatifs en vue à la Loi sur la concurrence du Canada
La loi visant à mettre en œuvre le dernier budget fédéral déposée en avril 2022 prévoit apporter de nombreux changements importants à la Loi sur la concurrence. En effet, bien que le gouvernement fédéral ait indiqué que les modifications proposées sont relativement mineures, en réalité elles affecteront de façon importante plusieurs aspects du droit de la concurrence canadien, en particulier en ce qui concerne les relations de travail, les recours potentiels à l’encontre de certaines pratiques commerciales, les règles applicables en matière de prix d’affichage et la gestion des risques réglementaires.
Le présent bulletin vise à donner un aperçu des modifications proposées. Pour obtenir davantage d’information, ou si vous souhaitez une présentation plus détaillée afin d’évaluer les impacts potentiels sur votre entreprise, n’hésitez pas à contacter l’un des membres de notre groupe de droit de la concurrence ou encore votre contact usuel chez McMillan.
Criminalisation des ententes entre concurrents concernant le maraudage des employés et les salaires :
Dans la foulée de la pandémie et à la suite de certains changements survenus aux États-Unis, le gouvernement fédéral propose d’étendre l’infraction pénale interdisant les cartels aux accords entre concurrents concernant les salaires, les conditions de travail ou encore visant à contrer le maraudage d’employés. Si elles sont adoptées, ces dispositions entreront en vigueur un an plus tard. Pour plus d’information concernant ces modifications veuillez consulter notre bulletin spécifique à cet égard intitulé Les modifications récemment proposées à la Loi sur la concurrence introduisent une nouvelle infraction pénale visant la fixation des salaires et les accords de non-sollicitation.
Notez que relativement à l’infraction relative aux cartels, le projet de loi prévoit également de supprimer le plafond des amendes qui peuvent être imposées et en laisser dorénavant la détermination à la pleine discrétion du tribunal.
Répression renforcée des situations d’abus de position dominante :
Le projet de loi prévoit aussi trois changements majeurs relativement aux abus de position dominante qui ont pour effet de réduire sensiblement la concurrence dans un marché.
Premièrement, le projet de loi introduit un nouveau seuil pour la pénalité administrative qui peut être imposée à l’entreprise dominante. Le nouveau seuil prévu est équivalent à trois fois l’avantage financier tiré de la conduite reprochée. Si ce montant ne peut être déterminé raisonnablement, le Tribunal pourrait imposer une pénalité pouvant atteindre 3 % des revenus bruts mondiaux annuels de l’entreprise dominante. La pénalité administrative pour abus de position dominante est actuellement plafonnée à 10 millions de dollars pour une première infraction et à 15 millions pour toute récidive.
Deuxièmement, le projet de loi élargit la définition d’acte anticoncurrentiel afin de viser non seulement les actions qui ont un effet anticoncurrentiel, mais également « tout agissement destiné à avoir » un tel effet. En outre, la liste des agissements anticoncurrentiels est modifiée pour inclure explicitement la discrimination « visant à entraver ou à empêcher l’entrée ou l’expansion d’un concurrent sur un marché ». Les amendements introduisent également des facteurs supplémentaires que le Tribunal peut prendre en considération lorsqu’il évalue si une pratique a pour effet de réduire sensiblement la concurrence – notamment si la pratique constitue une barrière à l’entrée ou si elle a un impact sur le prix ou sur d’autres facteurs non quantitatifs de nature à aiguiller le choix des consommateurs, tels la qualité des produits concernés ou le respect de leur vie privée.
Troisièmement, le projet de loi prévoit que des recours en abus de position dominante au Tribunal de la concurrence pourraient dorénavant être introduits par des parties privées (sur autorisation de ce dernier). La Loi sur la concurrence permet déjà l’institution de recours privés, mais seulement concernant quelques autres pratiques à portée plus restreinte. Le critère requis pour obtenir l’autorisation du Tribunal sera le même : la partie privée demanderesse devra essentiellement démontrer que son entreprise est « directement et substantiellement affectée » par le comportement en cause. Le principal remède disponible en cas d’abus de position dominante est une ordonnance interdisant le comportement abusif. Le Tribunal aura toutefois le pouvoir d’édicter toute autre mesure remédiatrice, incluant l’imposition de pénalités administratives. Celles-ci sont toutefois payables au gouvernement. Les parties privées demanderesses ne pourront toujours pas demander l’octroi de dommages-intérêts par le Tribunal de la concurrence.
Prix d’appel et pénalité accrue pour publicité fausse et trompeuse
Les modifications prévues comprennent en outre une nouvelle disposition stipulant que la pratique d’utiliser un prix d’appel (donc incomplet) pour attirer la clientèle « constitue une indication fausse ou trompeuse », et ce, tant en vertu des dispositions pénales que civiles de la Loi sur la concurrence. La nouvelle règle couvrirait les indications de prix qui excluent des charges ou des frais obligatoires fixes (à l’exclusion des taxes de vente fédérales ou provinciales). Comme indiqué précédemment (voir le Intelligence Memo du C.D. Institut Howe par Josh Krane et James Musgrove), ces modifications créeront d’importants défis en matière de publicité commerciale au Canada. Les modifications proposent également d’augmenter considérablement les pénalités administratives applicables en cas de publicité trompeuse (de façon analogue à celles qui seront applicables en matière d’abus de position dominante, tel que discuté ci-dessus).
Mécanisme anti-évitement pour les fusions :
Plusieurs types de fusions et acquisitions nécessitent un avis préalable au Bureau de la concurrence si la transaction dépasse les seuils applicables[1]. Les modifications proposées à la Loi contiennent une disposition anti-évitement (qui est pour l’instant formulée de manière large et plutôt vague). Cette disposition anti-évitement vise à cibler les transactions délibérément structurées pour éviter d’envoyer l’avis préalable requis au Bureau. Le fonctionnement précis de cette mesure anti-évitement n’est toutefois pas indiqué pour le moment.
Prochaines étapes?
Bien que substantiels, ces changements ne constituent vraisemblablement qu’une première étape, avant une révision encore plus en profondeur de la Loi sur la concurrence. Des bulletins subséquents seront publiés au fur et à mesure des développements à venir.
[1] Le Bureau peut réviser et s’opposer à une fusion jusqu’à un an suivant la clôture de la transaction, même si la transaction n’est pas sujette à la notification obligatoire.
par le Groupe de concurrence de McMillan
Mise en garde
Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.
© McMillan S.E.N.C.R.L., s.r.l. 2022
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