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Investissements étrangers au Canada : minéraux critiques et parution d’un rapport annuel

Le 7 novembre 2022 Bulletin sur les investissements étrangers Lecture de 14 min

Le Canada reste ouvert aux affaires et aux investissements étrangers[1]. Cela dit, le gouvernement change d’approche quant à l’examen des investissements étrangers et accorde une attention aux enjeux de sécurité nationale.

Le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie a énoncé la nouvelle politique dans sa déclaration du 2 novembre dernier, où il a annoncé la décision du gouvernement d’ordonner à trois investisseurs chinois de se départir de leurs intérêts dans trois petites entreprises canadiennes d’exploration minière. Il a prévenu que « [l]le Canada continuera[it] d’accueillir les investissements étrangers directs, mais agira[it] de manière décisive dans le cas d’investissements constituant une menace pour notre sécurité nationale et nos chaînes d’approvisionnement en minéraux critiques, au pays comme à l’étranger » et précisé que le gouvernement « demeur[ait] résolu à travailler avec les entreprises canadiennes pour attirer les investissements étrangers directs de partenaires qui partagent nos intérêts et nos valeurs ».

Le présent bulletin résume trois faits nouveaux d’importance, à savoir :

  • l’évolution du régime de sécurité nationale du Canada;
  • la nouvelle approche du Canada pour l’examen des investissements dans des minéraux critiques (approche dont découlent les trois décrets susmentionnés);
  • le dernier rapport annuel décrivant la manière dont le gouvernement fait appliquer la Loi sur Investissement Canada (« LIC »), soit la loi fédérale régissant les investissements étrangers directs au Canada.

1.    Le cadre de la Loi sur Investissement Canada

Aux termes de la LIC, l’investisseur étranger qui acquiert le contrôle d’une entreprise canadienne ou en fonde une nouvelle doit déposer un avis administratif ou, si certains seuils financiers sont atteints, une demande d’examen[2]. Il ne peut pas conclure une acquisition sujette à examen avant que le ministre n’établisse, compte tenu de six facteurs énoncés dans la LIC, que l’investissement serait à l’« avantage net » du Canada[3].

La LIC confère au gouvernement le pouvoir discrétionnaire de soumettre à un examen relatif à la sécurité nationale tout investissement effectué au pays par un non-Canadien, y compris l’acquisition d’une participation minoritaire sans contrôle dans une entreprise canadienne, l’acquisition d’une entité exerçant des activités au Canada ou la fondation d’une entreprise canadienne.

L’examen relatif à la sécurité nationale a pour but de déterminer si l’investissement envisagé est susceptible de porter atteinte à la sécurité nationale du Canada, auquel cas le gouvernement peut interdire l’investissement ou l’assortir de conditions.

2.     L’évolution du régime de sécurité nationale du Canada

Depuis le début de la pandémie, le Canada a élargi son approche de l’examen relatif à la sécurité nationale et s’est montré plus enclin qu’auparavant à l’énoncer.

a)    Contrôle renforcé en contexte pandémique

Le 18 avril 2020, le gouvernement a prévenu, dans l’Énoncé de politique sur l’examen des investissements étrangers et le COVID-19 (toujours en vigueur), qu’il était possible d’utiliser les pouvoirs conférés par la LIC en matière de sécurité nationale pour soumettre à un examen approfondi les investissements faits dans des secteurs participant à l’approvisionnement en biens et en services essentiels (p. ex., santé). Il a ainsi élargi l’approche historique de l’examen relatif à la sécurité nationale dans trois domaines – l’alimentation, les transports et les autres chaînes d’approvisionnement névralgiques – considérés comme essentiels dans les réponses gouvernementales à la pandémie. Le gouvernement canadien a aussi reconnu la possibilité que certains investissements faits au pays par des entreprises d’État[4] soient motivés par des impératifs non commerciaux susceptibles de nuire aux intérêts économiques ou de sécurité nationale du Canada. Au sujet de la politique en question, voir notre bulletin antérieur.

b)    Nouvelles lignes directrices en matière de sécurité nationale

Le 24 mars 2021, le gouvernement a mis à jour ses Lignes directrices sur l’examen relatif à la sécurité nationale des investissements (les « Lignes directrices en matière de sécurité nationale »), adoptées en 2016, afin (i) de réitérer qu’il examinera de plus près tous les investissements étrangers effectués par des investisseurs d’État (ou des investisseurs privés considérés comme étant étroitement liés à des gouvernements étrangers), quelle que soit la valeur de l’investissement, et (ii) de donner des précisions sur les facteurs pris en compte pour déterminer si un investissement est susceptible de présenter des problèmes liés à la sécurité nationale, dont les suivants : transfert de technologies ou de savoir-faire sensibles à l’extérieur du Canada; approvisionnement de biens et services essentiels aux Canadiens; incidence possible sur la sécurité des infrastructures essentielles, les minéraux critiques ou les chaînes d’approvisionnement en minéraux critiques du Canada; données personnelles sensibles. Au sujet des nouvelles lignes directrices, voir notre bulletin antérieur.

c)    Énoncé de politique sur l’examen des investissements étrangers

Le 8 mars dernier, le gouvernement a réagi à l’invasion de l’Ukraine par la Russie par la publication de l’Énoncé de politique sur l’examen des investissements étrangers et la crise en Ukraine. Selon ce document, (i) les investissements effectués par des investisseurs russes ne seront jugés à l’avantage net du Canada qu’à titre exceptionnel et, (ii) s’il est établi que tout autre investissement, quelle que soit sa valeur, « a des liens, directs ou indirects, avec un particulier ou une entité associé à l’État russe, contrôlé par ce dernier ou soumis à son influence », ce constat s’ajoutera aux motifs raisonnables de croire que l’investissement est susceptible de porter atteinte à la sécurité nationale du Canada. Au sujet de l’énoncé en question, voir notre bulletin antérieur.

d)    Examen de l’acquisition de Neo Lithium Corp.

En janvier dernier, le gouvernement a autorisé une entreprise d’État chinoise, Zijin Mining Group, à acheter Neo Lithium Corp, une société minière qui était cotée en bourse au Canada et avait son siège social au pays, mais dont tous les actifs de lithium se trouvaient à l’étranger, pour une somme d’environ 960 millions de dollars.

Cette décision a suscité des critiques importantes, notamment de la part du Comité permanent de l’industrie et de la technologie. Le 29 mars dernier, ce dernier a adressé à la Chambre des communes un rapport appelant, entre autres, à une plus grande transparence dans l’examen des investissements étrangers. La réponse déposée par le gouvernement le 22 juin dernier détaille le processus d’examen relatif à la sécurité nationale des investissements et reconnaît la nécessité de trouver un équilibre entre le maintien de la réputation du Canada comme endroit pour investir et la protection de sa sécurité nationale et de ses intérêts nationaux à long terme[5].

e)     Modifications à la LIC concernant l’examen relatif à la sécurité nationale

Le 2 août dernier, le Règlement sur les investissements susceptibles de porter atteinte à la sécurité nationale (examen) a été modifié afin de permettre aux investisseurs étrangers de déposer un avis volontaire relativement à un investissement pour lequel ils ne sont pas tenus de le faire (p. ex., acquisition d’une participation minoritaire sans contrôle dans une entreprise canadienne).

  • Si l’investisseur étranger produit un avis volontaire, le gouvernement dispose de 45 jours pour appliquer le régime d’examen relatif à la sécurité nationale.
  • Dans le cas contraire, le gouvernement peut appliquer le régime au plus tard cinq ans après l’investissement.

3.     Nouvelle approche des minéraux critiques

a)  Nouvelle politique sur les minéraux critiques

Le 28 octobre dernier, parallèlement à la publication du Rapport annuel (décrit plus loin), le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie et le ministre des Ressources naturelles ont fait une déclaration pour annoncer l’adoption de la Politique concernant les investissements étrangers par des entreprises d’État dans les minéraux critiques dans le cadre de la Loi sur Investissement Canada (la « Politique sur les minéraux critiques »).

Au début du document, le gouvernement reconnaît que la prospérité future du Canada et son leadership dans les secteurs des technologies émergentes à faibles émissions de carbone et d’autres technologies exigent un accès aux minéraux critiques fiable et fondé sur le marché, et ce, tout au long de la chaîne de valeur, et que les minéraux critiques sont des intrants indispensables pour les secteurs de la défense et de la haute technologie. Dans ce contexte, certains investissements effectués au pays par des entreprises d’État peuvent être motivés par des impératifs non commerciaux qui vont à l’encontre des intérêts du Canada, surtout s’il s’agit d’un État aux vues divergentes.

Relativement à ces enjeux, la Politique sur les minéraux critiques prévoit ce qui suit :

  • Si le critère de l’avantage net s’applique, les investissements effectués par des entreprises d’État dans les secteurs des minéraux critiques (ou des investisseurs privés jugés étroitement liés à un État étranger ou susceptibles de subir l’influence d’un État étranger ou de devoir se conformer à ses directives extrajudiciaires) seront approuvés comme satisfaisant au critère à titre exceptionnel seulement.
  • Dans tous les autres cas, le gouvernement pourra considérer avoir des motifs raisonnables de croire que l’investissement, quelle que soit sa valeur, est susceptible de porter atteinte à la sécurité nationale du Canada.

Cette politique rappelle l’approche adoptée par le gouvernement en 2012 devant une hausse des prises d’intérêts d’entreprises d’État dans les sables bitumineux canadiens. Conscient de l’importance névralgique de ces ressources, qui appartiennent en majeure partie au secteur privé, le gouvernement avait prévenu que, « compte tenu des risques inhérents que posent les acquisitions dans les sables bitumineux canadiens par des [entreprises d’État], le Ministre sera[it] d’avis que l’acquisition du contrôle d’une entreprise canadienne de sables bitumineux représente un avantage net [à] titre exceptionnel seulement[6] ».

b)    Décrets ordonnant à des entités chinoises de se départir de leurs intérêts dans certaines sociétés d’exploration

Le 2 novembre 2022, le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie a annoncé dans une brève déclaration que le gouvernement avait réalisé des examens relatifs à la sécurité nationale de « plusieurs investissements dans des entreprises canadiennes des secteurs […] des minéraux critiques, dont celui du lithium », puis avait pris des décrets finaux ordonnant à trois investisseurs sous contrôle chinois de se départir de leurs intérêts dans trois sociétés ouvertes canadiennes cotées à la Bourse de croissance TSX :

  • Sinomine (Hong Kong) Rare Metals Resources Co., Limited (« Sinomine ») doit se départir de son investissement dans Power Metals Corp. Sinomine a acquis en janvier 2022 une participation de 5,7 % dans Power Metals (au coût de 1,5 million de dollars), puis a conclu en mars 2022 un accord d’enlèvement visant toute la production de lithium et de tantale du gisement de Case Lake, en Ontario (à condition que Sinomine conserve une participation d’au moins 2,5 % dans Power Metals – ce qui ne sera plus le cas si elle procède au dessaisissement). Les deux parties ont réagi au décret en publiant des communiqués de presse préliminaires. Celui de Power Metals indique que Sinomine examine les possibilités d’appel et communiquera sous peu avec le gouvernement du Canada.
  • Chengze Lithium International Limited (« Chengze ») doit se départir de son investissement dans Lithium Chile Inc. Chengze a acquis en mai 2022 une participation de 19,35 % dans Lithium Chile (au coût de 27,9 millions de dollars), dont elle détenait auparavant 5,14 %. Lithium Chile semble posséder des sites au Chili et en Argentine, mais pas au Canada. Les deux parties ont réagi au décret en publiant des communiqués de presse préliminaires. Celui de Lithium Chile indique que Chengze examine le contenu du décret et les recours potentiels.
  • Zangge Mining Investment (Chengdu) Co., Ltd. (« Zangge ») doit se départir de son investissement dans Ultra Lithium Inc. Zangge a acquis en mai 2022 une participation de 14,17 % dans Ultra Lithium (au coût de 4,14 millions de dollars). Elle s’est également engagée en juin 2022 à verser 10 millions de dollars US à Ultra Lithium et à investir 40 millions de dollars US dans son projet d’exploration en Argentine en échange d’une participation de 65 % dans Ultra Argentina S.R.L., la filiale qui possède le site argentin. Zangge et Ultra Lithium ont réagi au décret en publiant un communiqué de presse préliminaire. Ultra Lithium indique que les parties ont convenu de mettre fin à la convention définitive visant le projet d’exploration en Argentine. Déterminée à préserver la valeur actionnariale, elle examine les recours et les autres options qui s’offrent à elle.

Le ministre n’a communiqué ni le contenu des décrets ni les raisons derrière cette décision; il a simplement réaffirmé que les minéraux critiques sont essentiels à la prospérité future du Canada.

Ces décrets parallèles présentent plusieurs caractéristiques notables :

  • Si les trois investisseurs sont des sociétés ouvertes chinoises cotées à la bourse de Shenzhen, chacun semble avoir été jugé étroitement lié au gouvernement de la République populaire de Chine (la « RPC »), ou susceptible de subir l’influence de la RPC ou de devoir se conformer à ses directives extrajudiciaires. Sans invoquer explicitement d’éventuels liens entre ces trois investisseurs et une entreprise d’État, la déclaration du ministre comprend un hyperlien direct vers la Politique sur les minéraux critiques (décrite ci-dessus), qui ne s’applique qu’aux entreprises d’État et aux investisseurs susceptibles d’être influencés ou contraints par un gouvernement étranger.
  • Aucun des investisseurs chinois ne semble avoir acquis le « contrôle » des entreprises canadiennes (au sens de la LIC) ou être une « personne qui a le contrôle » de facto de ces entreprises au sens du droit des valeurs mobilières (personne qui détient plus de 20 % d’une société ouverte).
  • Les trois entreprises canadiennes sont de jeunes sociétés d’exploration minière, cotées à la Bourse de croissance TSX, ayant des projets d’exploration visant le lithium. Leurs projets sont au stade préliminaire; elles ne font aucune production commerciale. L’intervention survient donc très tôt dans la mise en valeur des dépôts de minéraux critiques appartenant à ces entités.
  • Deux des entreprises canadiennes n’ont aucun gisement de lithium au Canada : elles détiennent des participations dans des projets d’exploration au Chili (Lithium Chile) et en Argentine (Ultra Lithium). Le gouvernement a donc changé de cap depuis sa décision, plus tôt cette année, de ne pas intervenir dans l’acquisition par Zijin Mining de Neo Lithium, qui travaillait sur un projet au Chili (voir ci-dessus). Si le gouvernement a agi quant aux actions de la société mère canadienne, la vente, par une entreprise canadienne, d’actifs situés entièrement à l’étranger ne déclencherait aucun examen en vertu de la LIC.
  • Les trois décrets, qui visent la vente d’actions de sociétés ouvertes, constituent une première au Canada. Ils obligeront les investisseurs chinois à se départir de leurs actions d’ici une date limite confidentielle. Bien que la politique gouvernementale fasse peu de cas d’une éventuelle baisse de la valeur des actifs vendus, obliger un actionnaire à vendre un important bloc d’actions fera vraisemblablement chuter le cours des titres (« vente en catastrophe »), qui ne reflétera plus forcément la valeur sous-jacente de la société et de ses projets. Les actions des jeunes émetteurs de la Bourse de croissance TSX sont peu fréquemment négociées; ces sociétés ne peuvent donc pas absorber une vente rapide d’un grand nombre d’actions. Par ailleurs, comme les jeunes sociétés d’exploration comptent généralement sur le financement par actions pour payer leurs dépenses d’exploitation, une baisse importante et imprévue du cours de leurs titres peut directement compromettre leur capacité à obtenir du financement à des conditions avantageuses (ou aux conditions du marché). Résultat, leurs projets coûteront plus cher, et l’avoir des actionnaires sera dilué.
  • Les décrets et la Politique sur les minéraux critiques pourraient freiner l’afflux de capitaux en provenance d’entreprises d’État chinoises et d’investisseurs très proches de la RPC vers les entreprises canadiennes ayant des projets d’exploration et d’exploitation.
    • Le gouvernement a déclaré qu’il « demeure résolu à travailler avec les entreprises canadiennes pour attirer les investissements étrangers directs de partenaires qui partagent nos intérêts et nos valeurs ». Il « continuer[a] d’encourager et de soutenir les entreprises canadiennes et de collaborer avec celles qui sont à la recherche d’investissements », et « les aider[a] également à trouver des partenariats et à déterminer ceux qui présentent un intérêt supérieur pour les entreprises, les travailleurs et l’économie de notre pays ». La nature et l’ampleur des mesures gouvernementales de soutien aux jeunes sociétés d’exploration (y compris – potentiellement – Power Metals, Ultra Lithium et Chile Lithium) restent à voir.
    • Il faudra de nouvelles sources de financement étrangères pour aider les sociétés canadiennes ayant des actifs ici ou ailleurs à trouver et à extraire des minéraux critiques. Ainsi, de belles occasions s’offriront aux investisseurs des pays qui sont des partenaires commerciaux privilégiés du Canada.
    • Au moment de conclure un nouveau contrat de financement par actions, de financement par emprunt ou de toute autre nature (p. ex. un contrat de coentreprise), les sociétés canadiennes du secteur des minéraux critiques devront vérifier l’origine de l’investisseur potentiel et les risques pour la sécurité nationale. Si l’investisseur est étroitement lié à une entreprise d’État, ou susceptible de subir l’influence d’une telle entreprise ou de la RPC, les parties canadiennes auront probablement intérêt à négocier de bonnes protections contractuelles de transfert des risques.

4.      Rapport annuel sur la LIC

Le 28 octobre dernier, le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie a publié le Rapport annuel 2021-2022 (le « Rapport annuel »), qui résume les faits nouveaux en matière de politiques, les activités d’investissement et l’importance grandissante des questions de sécurité nationale en vertu de la LIC pour l’exercice terminé le 31 mars 2022.

a)    Dossiers déposés et examens de l’avantage net

L’exercice 2021-2022 a vu le dépôt d’un nombre record de dossiers en vertu de la LIC. En effet, les 1 255 dossiers déposés représentent une hausse de 52 % par rapport à 2020-2021 (826 dossiers) et de 22 % par rapport au sommet précédent (1 032 dossiers en 2019-2020). Cette augmentation reflète la reprise des économies canadienne et mondiale ainsi que les données de l’OCDE : le Canada a reçu 98,3 milliards de dollars US d’investissements étrangers en 2021, contre 46,5 milliards en 2019[7].

Les États-Unis demeurent en tête du palmarès des investissements ayant fait l’objet d’un dépôt en 2021-2022 (731 investissements, 58 % du total), suivis par l’Union européenne (209 investissements, 17 % du total), le Royaume-Uni (88 investissements, 7 % du total) et la Chine, y compris Hong Kong (50 investissements, 7 % du total).

Les huit investissements soumis à un examen de l’avantage net (qui représentaient moins de 1 % des investissements totaux) ont été approuvés par le ministre. Ils présentaient une valeur d’entreprise moyenne de 3,9 milliards de dollars. Chaque examen a duré en moyenne 88 jours, ce qui représente une légère hausse par rapport aux cinq exercices précédents (72 à 85 jours).

b)    Examens relatifs à la sécurité nationale

En 2021-2022, comme en 2020-2021, 24 propositions d’investissement ont fait l’objet d’un examen relatif à la sécurité nationale. Cela représente une hausse marquée par rapport à 2019-2020 (10), 2018-2019 (9) et

2017-2018 (4). Des 24 examens réalisés en 2021-2022, 12 étaient des examens prolongés pouvant déboucher sur un décret final bloquant l’investissement ou imposant des conditions.

Sur les 24 propositions examinées, 16 (67 %) ont été autorisées, sept ont été retirées, et une était toujours en cours d’examen à la fin de l’exercice. Les chiffres étaient semblables en 2020-2021 : 16 investissements sur 24 avaient été autorisés, cinq avaient été retirés, et trois avaient fait l’objet d’un décret de blocage ou de dessaisissement. Ainsi, le nombre d’examens en profondeur augmente, mais la grande majorité des transactions examinées est autorisée.

Des 12 propositions d’investissement soumises à un examen relatif à la sécurité nationale prolongé en 2021-2022, six provenaient de la Chine, quatre de la Russie, une de la Jordanie et une de la Finlande. Deux propositions de la Chine, une de la Russie et celle de la Jordanie ont été retirées, pour un total de quatre retraits. L’examen en cours porte sur une demande de la Chine. Le portrait était différent en 2020-2021 : des 11 propositions d’investissement soumises à un examen prolongé, sept provenaient de la Chine, une de la Russie, une de Taïwan, une des Émirats arabes unis et une du Royaume-Uni). Quatre ont été retirées (trois de la Chine et celle du Royaume-Un(i), deux ont fait l’objet d’un dessaisissement (une de la Chine et celle des Émirats arabes unis) et une a été bloquée (en provenance de la Chine).

Les examens prolongés réalisés en 2021-2022 visaient des secteurs variés : extraction de minerais métalliques, épiceries, service de taxi et de limousine, activités de soutien au transport par eau, traitement de données, intermédiation et courtage de valeurs mobilières et de contrats de marchandises, systèmes informatiques, services de conseils en gestion et de conseils scientifiques et techniques, recherche scientifique et autres.

Sur les 50 investissements chinois effectués au Canada en 2021-2022, seulement six (12 %) ont fait l’objet d’un examen prolongé. De ces six, deux ont été retirés, et un est toujours en cours d’examen. Ces données montrent que le flot d’investissements en provenance de la RPC et de Hong Kong ne tarit pas, et que peu d’investissements font l’objet d’un retrait, d’un blocage, d’un dessaisissement ou d’une autre entrave.

5.     Conclusion

D’une position d’ouverture aux affaires, le gouvernement est passé à une politique plus nuancée, selon laquelle le Canada « continuer[a] d’accueillir les investissements étrangers directs », mais « agira de manière décisive lorsque des investissements constituent une menace pour notre sécurité nationale et nos chaînes d’approvisionnement en minéraux critiques ».

Le processus d’examen de la LIC soulèvera des questions de plus en plus fréquentes et complexes, notamment en ce qui concerne :

(i) les investissements effectués par des entreprises d’État ou des investisseurs privés étroitement liés à un gouvernement étranger ou susceptibles d’en subir l’influence et (ii) un ensemble élargi de secteurs potentiellement sensibles, dont les minéraux critiques, la santé, l’intelligence artificielle et les autres technologies sensibles, les données personnelles ainsi que les infrastructures critiques. Divers facteurs peuvent entrer en jeu dans l’examen d’un investissement, comme la propriété et le contrôle de l’investisseur, la taille de l’entreprise canadienne et la nature de ses activités ainsi que la structure projetée de l’investissement. Nous recommandons aux investisseurs étrangers de consulter en amont des experts juridiques à même de les conseiller stratégiquement sur les risques qui pourraient découler de leur investissement et les manières de les atténuer.

Pour en savoir plus sur le sujet traité dans le présent bulletin ou un nouvel investissement au Canada, n’hésitez pas à communiquer avec nous ou avec votre personne-ressource chez McMillan. Nous serons très heureux d’étudier avec vous l’incidence des transactions que vous envisagez sous l’angle des risques pour la sécurité nationale.

[1] Voir aussi : Affaires mondiales Canada, Faits saillants sur la compétitivité du Canada en matière d’investissement direct étranger.
[2] Pour en savoir plus sur les obligations de dépôt, consultez notre Tableau des seuils, qui résume les seuils de la Loi sur la concurrence et de la Loi sur Investissement Canada en vigueur en 2022.
[3] S’il est parfois permis de déposer la demande d’examen après l’investissement, dans la plupart des cas, il faut le faire avant, et attendre l’approbation ministérielle pour clore l’investissement.
[4] La LIC donne une définition large du terme « entreprise d’État » : a) le gouvernement d’un État étranger ou celui d’un de ses États ou d’une de ses administrations locales, ou tout organisme d’un tel gouvernement; b) une unité contrôlée ou influencée, directement ou indirectement, par un gouvernement ou un organisme visés à l’alinéa a); c) un individu qui agit sous l’autorité d’un gouvernement ou d’un organisme visés à l’alinéa a) ou sous leur influence, directe ou indirecte.
[5] Les réserves de Neo Lithium produiront du carbonate de lithium plutôt que de l’hydroxyde de lithium, et les limites relatives aux usages finaux ont été prises en compte dans l’évaluation des risques pour la sécurité (comme le rapporte cet article).
[6] Voir aussi la déclaration faite en 2012 par le premier ministre du Canada sur les investissements étrangers dans les sables bitumineux du pays.
[7] Sur les 1 255 dossiers déposés en 2021-2022 on dénombre 1 247 avis d’investissement certifiés (dont 278 avis concernant la constitution d’une nouvelle entreprise canadienne) et seulement huit demandes d’examen de l’avantage net. Le faible nombre d’acquisitions soumises à un tel examen s’explique par les seuils déclencheurs très élevés (quant à la valeur d’entreprise) applicables aux acquisitions par des investisseurs dont le pays est un important partenaire commercial du Canada, entre autres les États-Unis; le Mexique; les membres de l’Union européenne; le Royaume-Uni; les pays du PTPGP, soit l’Australie, le Brunei, le Chili, le Japon, la Malaisie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Pérou, Singapour et le Vietnam; et la Corée. Ces seuils établis en 2009 ont été mis à jour ces dernières années.

Voir notre bulletin à ce sujet et notre tableau des seuils 2022.

par Beth Riley, Joshua Chad, Neil Campbell, Stephen Wortley et Sasa Jarvis

Mise en garde

Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.

© McMillan S.E.N.C.R.L., s.r.l. 2022

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