


Protection élargie de la propriété intellectuelle au Canada pour les bâtiments ou constructions
Protection élargie de la propriété intellectuelle au Canada pour les bâtiments ou constructions
Le 14 juin 2024, l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (l’OPIC) a modifié sa pratique à l’égard des dessins industriels appliqués aux bâtiments ou constructions. En effet, l’OPIC considère désormais que les bâtiments ou constructions peuvent faire l’objet d’une protection des dessins[1]. L’extension récente par l’OPIC de la protection des dessins industriels aux bâtiments et constructions peut avoir un impact sur les parties impliquées dans la conception et la construction de bâtiments ou constructions, notamment les architectes, les ingénieurs, les promoteurs et les propriétaires. Il est essentiel de comprendre comment le récent changement de pratique concernant le système des dessins industriels au Canada complète le régime actuel du droit d’auteur canadien pour régir les relations actuelles et futures entre ces parties.
Régime canadien des dessins industriels
Au Canada, les dessins industriels sont régis par la Loi sur les dessins industriels (LDI)[2]. Pour obtenir une protection, une demande d’enregistrement de dessins industriels doit être préparée et déposée conformément à la LDI. Une fois la demande déposée, elle est examinée par l’OPIC et, si les conditions en matière de forme et de fond sont remplies, les dessins industriels sont enregistrés. Le titulaire de l’enregistrement des dessins industriels jouit alors de la protection des dessins pendant une période de 10 ans à compter de la date d’enregistrement ou de 15 ans à compter de la date de dépôt de la demande, la plus longue de ces deux périodes étant retenue[3].
En règle générale, un dessin industriel peut être enregistré au Canada si les conditions suivantes sont remplies : a) la demande a été déposée conformément à la LDI; b) le dessin est nouveau; c) il est par le demandeur ou son prédécesseur en titre; d) il comprend des caractéristiques autres que celles résultant uniquement de la fonction utilitaire de l’objet fini en cause; e) il n’est pas contraire à la morale ou à l’ordre public[4].
Pour être nouveau, le dessin ne doit pas avoir été communiqué auparavant d’une manière qui lui aurait permis d’être accessible au public[5]. Nonobstant ce qui précède, les personnes qui communiquent publiquement leur propre dessin industriel disposent d’un délai de grâce de 12 mois pour présenter une demande d’enregistrement auprès de l’OPIC sans compromettre leur capacité à enregistrer leur dessin, malgré la communication antérieure[6].
Élargissement des protections aux bâtiments ou constructions
Le récent changement de pratique fait suite à un examen approfondi du cadre des dessins industriels du Canada et de la jurisprudence pertinente[7]. Notamment, ce changement de pratique aligne le Canada sur des pays tels que les États-Unis où les brevets de dessins pour les bâtiments et autres constructions sur site sont disponibles depuis longtemps. À titre d’exemple, citons la statue de la Liberté qui a été protégée par un brevet de dessin en 1879[8].
Le récent changement de pratique s’applique également rétroactivement aux demandes d’enregistrement de dessin industriel en instance, quelle que soit leur date de dépôt[9]. Aucun critère supplémentaire spécifique aux bâtiments ou constructions n’est requis, et ces demandes seront traitées de la même manière que toutes les autres demandes[10].
Étant donné que l’enregistrement d’un dessin industriel confère un monopole sur la reproduction du dessin industriel protégé, la protection du dessin industriel peut s’avérer précieuse pour les parties qui construisent des bâtiments ou constructions pourvus de dessins particulièrement distinctifs et remarquables. En effet, le titulaire d’un enregistrement de dessin industriel contrôle l’utilisation du dessin protégé et influence toute propagation ou restriction des dessins dans d’autres bâtiments ou constructions.
Révisions des dessins industriels et régime actuel du droit d’auteur
Au Canada, les œuvres architecturales sont protégées par le droit d’auteur. La Loi sur le droit d’auteur étend la protection du droit d’auteur aux œuvres qui sont des expressions artistiques et créatives originales fixées sur un support matériel[11] et qui sont produites par l’exercice du talent et du jugement[12]. En ce qui concerne les bâtiments ou constructions, ces œuvres peuvent inclure des plans et des dessins architecturaux, ainsi que l’expression artistique incarnée dans le bâtiment lui-même. En revanche, le système canadien des dessins industriels peut être utilisé pour protéger l’aspect visuel unique ou l’ornementation d’un bâtiment ou d’une structure, notamment sa forme, sa configuration, son motif ou son ornement. En tant que telle, la protection des dessins industriels peut chevaucher certaines caractéristiques des dessins protégés par le droit d’auteur, mais elle peut également s’appliquer à certaines caractéristiques des dessins qui ne sont pas actuellement protégés par le droit d’auteur. Il est donc prudent pour les propriétaires, les promoteurs, les architectes et les ingénieurs de penser à la propriété et au contrôle des droits sur les dessins industriels, en plus du droit d’auteur, lorsqu’ils concluent des contrats pour la conception et la construction de bâtiments ou constructions.
Principaux enseignements
Le récent changement de pratique de l’OPIC en ce qui concerne les dessins industriels appliqués aux bâtiments ou constructions peut avoir plusieurs implications pour les parties impliquées dans la conception et la construction de bâtiments ou constructions ainsi que pour les propriétaires de ces derniers. Ces implications comprennent les éléments suivants :
- Comme le note l’OPIC, « les bâtiments et les constructions […] sont acceptables en tant qu’objets finis auxquels un dessin peut être appliqué »[13].
- Lorsque plusieurs parties participent à la conception d’un bâtiment ou d’une construction, il serait prudent que les parties concernées précisent par écrit à quelle partie appartient le dessin industriel du bâtiment ou de la construction.
- Les parties impliquées dans la conception et la construction de bâtiments ou constructions doivent être conscientes de l’existence de dessins industriels appartenant à des tiers et des risques possibles de les contrefaire.
Pour savoir comment ces changements pourraient avoir une incidence sur vos projets et votre entreprise, envisagez de communiquer avec l’un des membres de l’équipe du droit de la propriété intellectuelle et du droit de la construction de McMillan.
Par : Alex Buonassisi, Pablo Tseng, Annik Forristal et Sydney Dahrouge (étudiante d’été en droit)
[1] Office de la propriété intellectuelle du Canada, « Pratique révisée concernant les dessins appliqués à des bâtiments ou constructions » (14 juin 2024), en ligne: [Pratique révisée de l’OPIC concernant les dessins].
[2] Loi sur les dessins industriels, LRC 1985, c. I-9.
[3] LDI, art. 10(b).
[4] LDI, art. 7.
[5] LDI, art. 8.2(1).
[6] LDI, art.8.2(1)(a).
[7] Pratique révisée de l’OPIC concernant les dessins.
[8] Brevet de dessin américain numéro 11 023.
[9] PADI juin 2024, art. 13.02.03.04.
[10] PADI juin 2024, art. 13.02.03.04.
[11] Loi sur le droit d’auteur, LRC 1985, ch. C-42, art. 5(1).
[12] CCH Canadian Ltée c. Barreau du Haut-Canada, 2004 CSC 13.
[13] Pratique révisée de l’OPIC concernant les dessins.
Mise en garde
Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.
© McMillan S.E.N.C.R.L., s.r.l. 2024
Perspectives (5 Posts)Voir Plus
Ah Gator! Le Canada demande qu’un acquéreur d’un désinvestissement précédent se départisse de ses investissements dans des minéraux critiques
Le gouvernement du Canada s’est adressé aux tribunaux pour obtenir le désinvestissement d’un investissement dans les minéraux critiques en vertu du régime de sécurité nationale du Canada.
Considérations juridiques au canada liées aux vidéos et images hypertruquées
Dans le sillage de notre récent bulletin sur le « clonage de la voix », nous discutons de l’applicabilité de certaines causes d’action aux « hypertrucages ».
Gestion des risques environnementaux dans les transactions commerciales, immobilières et financières
Joignez-vous à McMillan le mardi 1er avril prochain pour un webinaire présenté en anglais sur le droit de l’environnement durant lequel nous discuterons de questions importantes ayant une incidence sur les transactions commerciales, immobilières et financières au Canada.
Black History, Black Futures avec entre Paul Davis et l’athlète olympique Jerome Blake
Dans cet épisode, Paul Davis, associé au sein des groupes Marchés des capitaux et valeurs mobilières et Fusions et acquisitions, s’est entretenu avec le médaillé d’or olympique canadien Jerome Blake sur l’importance du mentorat dans son parcours vers la réussite.
Nouveaux énoncés de pratique de la commission des oppositions des marques de commerce entrant en vigueur le 1er avril 2025 sur la gestion de l’instance, les ordonnances de confidentialité et l’adjudication des frais
Les modifications du Règlement sur les marques de commerce mettent en œuvre la gestion de l’instance, les ordonnances de confidentialité et l’adjudication des frais dans les procédures d’opposition, de l’article 45 et d’objection.
Recevez des mises à jour directement dans votre boîte de réception. Vous pouvez vous désabonner en tout temps.