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Annonce des seuils d’avis de fusion et des seuils de la Loi sur Investissement Canada pour 2023

6 février 2023 Bulletin Concurrence, antitrust et investissements étrangers Lecture de 8 min

Les seuils d’avis de la Loi sur la concurrence du Canada et de la Loi sur Investissement Canada pour 2023 ont été annoncés. Pour une deuxième année de suite, cette fois-ci après une période d’inflation historiquement élevée, le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie a décidé de maintenir les seuils de la Loi sur la concurrence à 93 M$. C’était la première fois, l’an dernier, que le ministre décidait de ne pas modifier ce seuil, ce qui rompait avec la pratique habituelle consistant à suivre machinalement l’évolution du PIB. Le ministre a indiqué avoir pris la décision de manière quelque peu contre-intuitive, en partie en raison de l’augmentation du coût de la vie : « notre gouvernement continue de faire tout ce qu’il peut pour rendre la vie plus abordable, notamment en assurant un marché plus concurrentiel », a-t-il déclaré. Selon le communiqué publié, ce choix doit aussi permettre au Bureau de la concurrence de faire un examen minutieux des transactions et favoriser l’application d’un cadre réglementaire rigoureux.

Les seuils de la Loi sur Investissement Canada pour 2023 ont aussi été annoncés. Ils sont décrits plus en détail ci-après.

Loi sur la concurrence

Seuils

La Loi sur la concurrence exige qu’un préavis soit donné pour certaines fusions visant des entreprises exploitées au Canada lorsque les critères financiers de la « taille des parties » et de la « taille de la cible » sont tous les deux dépassés.

  • Le critère de la « taille de la cible » exige que la valeur comptable des actifs au Canada qui sont visés par l’acquisition ou qui appartiennent à la société dont les actions sont visées par l’acquisition, ou les revenus annuels bruts tirés des ventes réalisées au Canada ou en provenance du Canada à partir de ces actifs, dépassent un certain seuil. Le Bureau de la concurrence a annoncé que le seuil relatif à la « taille de la cible » sera maintenu à 93 M$ CA pour 2023.
  • Le critère de la « taille des parties » exige que les parties à une transaction, avec les membres de leurs groupes, possèdent des actifs au Canada ou des revenus annuels bruts tirés de ventes au Canada, ou en provenance ou en direction du Canada de plus de 400 M$ CA (ce seuil est le même depuis 1986).

Les frais de dépôt exigés par le Bureau de la concurrence pour les avis de fusion sont présentement de 77 452,36 $ CA. Ils seront rajustés en fonction de l’inflation le 1er avril 2023.

Selon des statistiques sur l’exercice 2022 du Bureau*, celui-ci a réalisé 252 examens de fusion, dont 237 qui concernaient des affaires où il y a eu dépôt d’un préavis de fusion en vertu de la Loi sur la concurrence et 15 qui concernaient des fusions n’ayant pas respecté les seuils de préavis, mais qui ont néanmoins fait l’objet d’un examen. Parmi les 237 affaires, 57 transactions ont été jugées complexes (24 %), et neuf (soit environ 3,8 %) ont fait l’objet de demandes de renseignements supplémentaires. Parmi les 252 affaires examinées, il y a eu contestation dans sept cas (environ 2,8 %), consentement dans quatre cas et abandon dans trois autres cas[1].

Loi sur Investissement Canada

Mise à jour des seuils

La Loi sur Investissement Canada exige que tout non-Canadien qui acquiert le contrôle d’une entreprise canadienne (qu’elle soit ou non sous le contrôle de Canadiens avant l’acquisition) dépose soit un avis, soit une demande d’examen. Pour l’application de cette loi, un non-Canadien s’entend notamment de toute entité qui n’est pas sous le contrôle de Canadiens ou dont des Canadiens ne sont pas les propriétaires véritables.

Les investisseurs de pays bénéficiant du traitement de la nation la plus favorisée en vertu d’accords de libre-échange conclus avec le Canada (dont ceux de l’Union européenne, les États-Unis, l’Australie, le Chili, la Colombie, le Honduras, le Japon, la Malaisie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Panama, le Pérou, Singapour, la Corée du Sud, le Royaume-Uni et le Vietnam)[2] qui ne sont pas des entreprises d’État sont généralement tenus de déposer une demande d’examen et d’approbation avant la clôture lorsqu’ils acquièrent directement une entreprise canadienne dont la valeur d’affaire dépasse 1,931 G$ CA en 2023. Cela représente une augmentation de près de 13 % par rapport au seuil de 2022 (1,711 G$ CA), qui avait lui-même augmenté de 9 % par rapport à celui de 2021 (1,565 G$ CA). Le seuil s’applique aussi à l’égard des investissements visant l’acquisition du contrôle d’une entreprise canadienne qui était, immédiatement avant l’investissement, sous le contrôle d’un investisseur issu de l’un de ces pays.

Les investisseurs OMC (entreprises sous contrôle dans les pays membres de l’OMC) qui ne sont pas des entreprises d’État et qui ne bénéficient pas du traitement de la nation la plus favorisée seront généralement tenus de déposer une demande d’examen et d’approbation avant la clôture lorsqu’ils acquièrent directement une entreprise canadienne dont la valeur d’affaire dépasse 1,287 G$ CA en 2023. Cela représente une augmentation de près de 13 % par rapport au seuil de 2022 (1,141 G$ CA), qui avait lui-même augmenté de 9 % par rapport au seuil de 2021 (1,043 G$ CA). Le seuil s’applique aussi aux investisseurs autres que des investisseurs OMC qui acquièrent directement le contrôle d’une entreprise canadienne qui était, immédiatement avant l’investissement, sous le contrôle d’un investisseur OMC.

En ce qui concerne les acquisitions directes par des entreprises d’État d’un pays membre de l’OMC, l’établissement du seuil aux fins d’approbation est fondé sur la valeur comptable des actifs plutôt que sur la valeur d’affaire. Pour 2023, le seuil relatif à la valeur des actifs est de 512 M$ CA.

Cela représente une augmentation de près de 13 % par rapport au seuil de 2022 (454 M$ CA), qui, comme dans les cas précédents, avait lui-même augmenté de 9 % par rapport au seuil de 2021 ($415 M$ CA). Ce seuil s’applique aussi aux entreprises d’État de pays qui ne sont pas membres de l’OMC et qui acquièrent le contrôle d’une entreprise canadienne qui était, immédiatement avant l’investissement, sous le contrôle d’un investisseur OMC.

Les seuils applicables aux investisseurs qui ne bénéficient pas du traitement de la nation la plus favorisée et aux investisseurs OMC sont rajustés annuellement en fonction du taux de variation annuel du PIB nominal. Le prochain rajustement devrait avoir lieu au début de l’année 2024.

Les seuils relatifs à la valeur des actifs pour les investissements effectués par des investisseurs autres que des investisseurs OMC qui ne sont pas décrits ci-dessus et pour les investissements réalisés dans des entreprises culturelles canadiennes demeurent à 5 M$ CA pour les acquisitions directes et à 50 M$ CA pour les acquisitions indirectes.

Examens de l’avantage net

Pendant l’exercice 2022, un nombre record de 1 255 dossiers ne visant pas des entreprises culturelles ont été déposés en vertu de la Loi sur Investissement Canada (que ce soit pour des acquisitions ou la création de nouvelles entreprises), soit 51,9 % de plus qu’à l’exercice précédent (826 dossiers). Le gouvernement attribue le faible nombre de dossiers de l’exercice 2021 en grande partie à la pandémie et note que, sur deux exercices, le nombre de dossiers déposés a augmenté de 21,6 %. Sur les 1 255 dossiers, il y a eu seulement huit examens de l’avantage net. On reconnaît là l’effet des seuils élevés applicables aux investisseurs qui ne bénéficient pas du traitement de la nation la plus favorisée et aux investisseurs OMC[3].

Examens relatifs à la sécurité nationale

La Loi sur Investissement Canada prévoit aussi un régime particulier d’examen relatif à la sécurité nationale. Tout investissement (même l’acquisition de participations minoritaires) par un non-Canadien dans une entreprise canadienne qui « pourrait porter atteinte à la sécurité nationale » peut faire l’objet d’un tel examen. Un examen relatif à la sécurité nationale peut être amorcé dans les 45 jours qui suivent la remise d’un avis ou d’une demande d’examen en vertu de la loi. Depuis août 2022, à l’égard d’un investissement pour lequel le dépôt d’un avis ou d’une demande d’examen n’est pas requis (p. ex., un investissement minoritaire ne donnant pas le contrôle), l’investisseur peut 1) soit déposer un avis volontaire, ce qui déclenche un délai de 45 jours, 2) soit ne pas déposer d’avis, ce qui déclenche un délai de cinq ans à compter de la date de réalisation de l’investissement, auquel cas le gouvernement peut décider de procéder à un examen relatif à la sécurité nationale. Lorsqu’une transaction soulève des préoccupations en matière de sécurité nationale, les investisseurs devraient envisager de déposer l’avis ou la demande d’examen bien à l’avance de la clôture, et les acquéreurs d’une participation minoritaire devraient envisager de déposer un avis volontaire, ce qui leur évitera d’être surpris par un examen après la clôture.

Des 1 255 dossiers d’investissement non culturel de l’exercice 2022, 24 (environ 2 %) ont nécessité l’intervention du mécanisme de sécurité nationale. Dans ces 24 dossiers :

  • l’investisseur a été informé dans neuf cas de la possibilité d’un examen complet en matière de sécurité nationale qui n’a finalement pas été nécessaire;
  • trois investisseurs ont été informés de la même possibilité et ont décidé de laisser tomber leur transaction avant qu’une décision ne puisse être prise quant à la nécessité de l’examen;
  • douze investissements ont fait l’objet d’un examen relatif à la sécurité nationale; cela représente un examen de plus que les onze de l’exercice 2021 et une nette augmentation par rapport à la moyenne de 5,3 examens par année observée de 2018 à 2020.

La durée moyenne des examens relatifs à la sécurité nationale a considérablement augmenté au cours des dernières années. Pour l’exercice 2022, elle est de 133 jours (à compter de la date de certification de l’avis ou de la demande)[4].

Des douze investissements ayant fait l’objet d’un examen complet :

  • sept ont été autorisés sans condition;
  • quatre ont été retirés;
  • un est en cours.

Des 39 transactions assujetties à un décret d’examen depuis l’exercice 2018, 22 (56 %) venaient de la Chine. Cela dit, la grande majorité des investissements en provenance de la Chine ne donnent pas lieu à un examen complet en matière de sécurité nationale au Canada. Pendant l’exercice 2022, 50 investissements ont été déposés par des investisseurs d’origine chinoise, dont seulement six (12 %) ont donné lieu à un examen complet.

Il convient aussi de noter que quatre des douze investissements ayant nécessité un examen complet au cours de l’exercice 2022 venaient de la Russie. Comme le rapport annuel d’ISDE sur l’application de la Loi sur Investissement Canada ne fournit pas de totaux pour les avis et les demandes liés à la Russie reçus pendant un exercice donné, il n’est pas possible de calculer de pourcentage. Il convient toutefois de noter qu’ISDE a publié en mars 2022 un énoncé de politique indiquant qu’un investissement avec un particulier ou une entité associé à l’État russe ou soumis à son influence serait considéré comme susceptible de porter atteinte à la sécurité nationale du Canada. On peut donc s’attendre à ce que les investissements venant de la Russie soient scrutés d’encore plus près à l’avenir.

Les examens relatifs à la sécurité nationale réalisés visaient majoritairement des secteurs liés aux technologies, à la fabrication et aux ressources naturelles, en particulier les minéraux critiques[5]. Pour en savoir plus sur les changements récents au régime des examens relatifs à la sécurité nationale, consultez notre bulletin récent traitant de ce sujet et d’autres implications du rapport annuel de l’exercice 2022.

Autres informations sur les fusions au Canada

Tableau des seuils : Consultez notre qui résume les seuils de la Loi sur la concurrence et de la Loi sur Investissement Canada.

Getting the Deal Through : Pour une analyse plus détaillée du régime canadien d’examen des fusions, voir James Musgrove, Mark Opashinov, Joshua Chad et Joshua Krane, “Canada”, Merger Control 2022 – Getting the Deal Through (Lexology), aux pages 182-212.

N’hésitez pas à communiquer avec le groupe Concurrence, antitrust et investissements étrangers de McMillan si vous avez des questions sur le rôle que pourraient jouer la Loi sur la concurrence et la Loi sur Investissement Canada dans une transaction. Nous serons très heureux de vérifier si l’un ou l’autre des seuils applicables sont dépassés et d’évaluer les risques éventuels entourant la sécurité nationale ou la concurrence dans une transaction que vous envisagez.

par le groupe Concurrence, antitrust et investissements étrangers

* L’exercice du gouvernement s’est terminé le 31 mars 2022.

[1] Bureau de la concurrence, Rapport sur la mesure du rendement et les statistiques du Bureau de la concurrence 2022-2023; pour la période se terminant le 30 septembre 2022.
[2] Cette liste comprend les sept pays autres que le Canada qui avaient ratifié l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (le « PTPGP ») en date du présent bulletin. Le Brunei n’a pas encore ratifié le PTPGP. Il pourra bénéficier du seuil le plus élevé une fois qu’il l’aura fait.
[3] Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE), Loi sur Investissement Canada, Rapport annuel 2021-2022, à la page 11. Ces chiffres ne tiennent pas compte des dossiers déposés auprès du ministère du Patrimoine canadien, qui s’occupe des acquisitions d’entreprises culturelles. Les rapports annuels du ministère sur l’administration de la Loi sur Investissement Canada pour les exercices 2021 et 2022 n’ont pas encore été publiés, et le registre de ses décisions et avis n’a pas été mis à jour depuis septembre 2021. Pour la période de 12 mois la plus récente pour laquelle on dispose d’information (terminée le 30 septembre 2021), le registre indique que le ministère a reçu 53 dossiers, dont 22 demandes d’examen de l’avantage net.
[4] ISDE, Loi sur Investissement Canada, Rapport annuel 2021-2022, à la page 26. Les années précédentes, le rapport annuel faisait uniquement état de la durée des examens complets. Par contraste, celui de l’exercice 2022 ne fait état que de la durée des examens de tous les investissements qui font intervenir le régime relatif à la sécurité nationale, y compris ceux ne nécessitant pas un examen complet.
[5] ISED, Loi sur Investissement Canada, Rapport annuel 2021-2022, aux pages 27 et 24-26.

Mise en garde

Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.

© McMillan S.E.N.C.R.L., s.r.l. 2023

 

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