Avis aux fournisseurs : nouvelles clauses contre le travail forcé dans les marchés fédéraux
Avis aux fournisseurs : nouvelles clauses contre le travail forcé dans les marchés fédéraux
Ce n’est pas tous les jours que s’entrecroisent les domaines des politiques fédérales d’approvisionnement et du commerce international des marchandises, mais tel est l’effet des politiques instaurées récemment par le Canada pour interdire le travail forcé[1]. Cette actualité n’ayant pas suscité une importante couverture, nous lui consacrons le présent bulletin.
La législation douanière canadienne prohibe l’importation de biens issus du travail forcé. Sur la scène internationale, la Chine a été maintes fois visée, aux États-Unis, par des mesures d’application des lois douanières en la matière.
Services publics et Approvisionnement Canada (« SPAC ») a publié un avis relatif aux politiques, l’AP-150, qui annonçait l’instauration de nouvelles clauses contractuelles. Entrées en vigueur le 11 novembre 2021, ces clauses autorisent le gouvernement du Canada à résilier un contrat si un bien est issu, en entier ou en partie, du travail forcé ou de la traite des personnes.
Au nombre de sept, elles doivent être utilisées par les agents de négociation des contrats pour tous les nouveaux marchés fédéraux ayant trait à des biens.
Le document précise que les clauses ne s’appliquent pas au processus de demande de soumissions, aux offres à commandes ou aux arrangements en matière d’approvisionnement. Les changements relatifs aux offres à commandes et aux arrangements en matière d’approvisionnement devraient être introduits dans une phase ultérieure. Rappelons cependant que les instructions actuelles relatives à ces offres et arrangements imposent le respect du Code de conduite pour l’approvisionnement, en vertu duquel les fournisseurs doivent, depuis août 2021, se conformer à l’interdiction frappant le travail forcé au Canada[2].
En gros, le gouvernement du Canada peut résilier un contrat sans pénalité en invoquant l’une des clauses standard suivantes :
- Nouvelle obligation interdisant à l’entrepreneur de vendre ou de livrer au Canada des marchandises fabriquées, en tout ou en partie, dans un contexte de travail forcé;
- Nouvelle option pour résilier un contrat si l’ASFC a classé les marchandises conformément au Tarif des douanes;
- Nouvelle option pour résilier un contrat s’il existe des motifs raisonnables de croire que la marchandise a été produite, en tout ou en partie, dans un contexte de travail forcé;
- Nouvelle option pour résilier un contrat si l’entrepreneur a été reconnu coupable d’une infraction pour traite de personnes au Canada ou à l’étranger;
- Droit conféré à l’entrepreneur de présenter des observations à SPAC avant que le contrat soit résilié.
Pour les besoins de la troisième clause de la liste précédente, les motifs raisonnables sont, entre autres, les suivants : constatations ou ordonnances de refus de mainlevée du Service des douanes et de la protection des frontières des États-Unis, en vertu de la US Trade Facilitation and Trade Enforcement Act (disponible en anglais seulement) de 2015, ou preuves crédibles soumises par une source digne de foi, y compris, sans s’y limiter, des organismes non gouvernementaux.
Si le registraire d’inadmissibilité et de suspension (le « registraire ») de SPAC convient de l’existence de motifs raisonnables, il émettra un avis concernant des préoccupations à l’intention de l’entrepreneur, et avertira au même moment l’autorité contractante au sujet du processus en cours.
L’avis concernant des préoccupations précisera les éléments préoccupants au fournisseur ainsi que la période d’une durée raisonnable qui lui est accordée pour fournir par écrit tout renseignement qu’il juge pertinent. Les échéances seront rigoureusement suivies puisque le contrat est déjà mis en place et en cours d’administration.
Si le Canada a l’intention de résilier un contrat en vertu de cet article, c’est-à-dire à cause d’un manquement à l’une ou l’autre des clauses précédentes, il en informera l’entrepreneur et lui donnera l’occasion de faire des observations écrites avant de prendre une décision finale. Les observations écrites doivent être soumises dans les 30 jours suivant la réception d’un avis concernant des préoccupations, à moins que le Canada fixe un délai différent.
Le registraire avisera l’entrepreneur de ses préoccupations concernant la clause applicable contre le travail forcé, et lui donnera un délai raisonnable pour présenter ses observations écrites. Ce sera à l’entrepreneur de déterminer les observations à présenter au registraire, le cas échéant. S’il y a lieu, l’agent de négociation des contrats émettra, en vertu de la clause Manquement de la part de l’entrepreneur, un avis de résiliation qui entre en vigueur immédiatement et qui n’offre aucune période de correction au fournisseur, par exemple pour qu’il remplace les marchandises (par des marchandises qui ne sont pas issues, en tout ou en partie, du travail forcé) dans un délai précis. Il est aussi possible d’envoyer un avis de résiliation qui prévoit une période de correction. Si, lors de consultations avec son client, l’agent de négociation des contrats juge que les marchandises sont essentielles, il aura l’option d’émettre un avis de résiliation prévoyant une période de correction ou de ne pas émettre d’avis de résiliation et de modifier le contrat pour changer la date de livraison.
Les mesures interdisant le travail forcé au Canada n’ont pas beaucoup été mises à l’épreuve. Elles peuvent néanmoins constituer un obstacle imprévu et considérable pour les soumissionnaires aux marchés publics et les titulaires de marchés publics.
Les groupes du commerce international et de l’approvisionnement au sein des marchés publics de McMillan peuvent éclairer la clientèle sur ces risques et lui proposer des analyses et des stratégies visant à les atténuer. Les auteurs du présent bulletin vous invitent à leur adresser vos questions.
<a id=”1″></a>[1] Bulletins antérieurs de McMillan : La lutte contre le travail forcé dans les chaînes d’approvisionnement sous l’angle des douanes canadiennes (décembre 2021); Le Canada pourrait resserrer sa réglementation du travail forcé dans les chaînes d’approvisionnement (juin 2022).
<a id=”2″></a>[2] Code de conduite pour l’approvisionnement : https://www.tpsgc-pwgsc.gc.ca/app-acq/cndt-cndct/cca-ccp-fra.html#s10.
Par Peter Jarosz et Tayler Farrell
Mise en garde
Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.
© McMillan S.E.N.C.R.L., s.r.l. 2023
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