


Entrée en vigueur du cadre d’ajustement de la durée des brevets au Canada
Entrée en vigueur du cadre d’ajustement de la durée des brevets au Canada
Le 1er janvier 2025, les dispositions relatives au nouveau cadre d’ajustement de la durée des brevets du Canada sont entrées en vigueur[1]. Ces modifications font partie des dernières mesures que le Canada devait prendre pour remplir ses obligations en vertu de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) et s’inscrivent à la suite d’autres modifications apportées récemment au système canadien des brevets, notamment l’introduction de taxes pour les revendications excédentaires et l’adoption d’une procédure de requête pour la poursuite de l’examen (RPE)[2].
Contexte général
L’ACEUM est entré en vigueur le 1ᵉʳ juillet 2020. En tant que partie à l’ACEUM, le Canada s’est engagé non seulement à traiter les demandes de brevets canadiens dans les meilleurs délais, mais aussi à compenser tout retard déraisonnable subi par les brevetés dans la délivrance de leurs brevets canadiens. En vertu des nouvelles dispositions canadiennes sur les brevets entrées en vigueur le 1ᵉʳ janvier 2025, le Canada compensera les titulaires de brevets pour les retards déraisonnables dans la délivrance de leurs brevets canadiens en prévoyant ce que la Loi sur les brevets et les Règles sur les brevets appellent une « période supplémentaire ».
Modifications apportées à la Loi sur les brevets
La Loi sur les brevets a été modifiée pour inclure l’article 46.1, qui fournit le cadre légal pour l’octroi d’une « période supplémentaire ». L’article 46.1(1) stipule ainsi qu’il suit (nous soulignons) :
46.1(1)Le commissaire accorde une période supplémentaire à la durée d’un brevet si, à la fois
(a) le brevet a été délivré après le cinquième anniversaire de la date applicable visée au paragraphe (2) ou, s’il est postérieur, après le troisième anniversaire du premier jour où, à l’égard de la demande de brevet, une requête d’examen a été faite au titre de l’article 35, la taxe réglementaire visée au paragraphe 35(1) a été payée et, s’il y a lieu, la surtaxe réglementaire visée à l’alinéa 35(3)a) a été payée;
(b) la date de dépôt de la demande de brevet est le 1er décembre 2020 ou après cette date;
(c) le breveté présente, conformément aux règlements, une demande de période supplémentaire et paie la taxe réglementaire dans les trois mois suivant la date de délivrance de son brevet.
Le terme « date applicable » est défini à l’article 46.1(2) de la Loi sur les brevets. En fonction du type de demande ayant donné lieu à la délivrance du brevet canadien, le terme « date applicable » peut être compris comme suit :
Type de demande | « Date applicable » | Fondement législatif |
Demande divisionnaire | Date de soumission |
L’article 117.02 (1) des Règles sur les brevets L’article 46.1(2)a) de la Loi sur les brevets |
Demande PCT d’entrée en phase nationale | Date d’entrée en phase nationale |
L’article 117.02(2) des Règles sur les brevets L’article 46.1(2)b) de la Loi sur les brevets |
Toute autre demande de brevet canadien (p. ex., la demande canadienne originale) | Date de dépôt de la demande | L’article 46.1(2)c) de la Loi sur les brevets |
Ainsi, pour un brevet canadien délivré sur la base d’une demande canadienne originale qui n’est ni une demande divisionnaire ni une demande PCT d’entrée en phase nationale, la date applicable est la date de dépôt de la demande de brevet.
Ni automatique ni gratuit
L’octroi de la période supplémentaire n’est pas automatique. Une demande de période supplémentaire doit être présentée par le demandeur[3], et une taxe réglementaire doit être payée[4].
Cette situation tranche de façon défavorable avec la pratique comparable aux États-Unis qui n’exige ni demande distincte ni frais. Les ajustements de la durée des brevets aux États-Unis, le cas échéant, sont déterminés lorsqu’une demande est acceptée et fournis dans le cadre de la lettre de notification de délivrance[5].
Taxe pour maintenir les droits en état pour une période supplémentaire
Une taxe est exigée pour maintenir les droits du breveté en état pour chaque période supplémentaire octroyée[6]. La même taxe est exigée à chaque date anniversaire à partir du 20ᵉ anniversaire[7].
Durée d’une période supplémentaire
La durée d’une période supplémentaire est égale au nombre de jours compris entre le cinquième anniversaire de la date applicable, comme définie dans le tableau ci-dessus, ou le troisième anniversaire de la requête d’examen (c.-à-d. le plus postérieur des anniversaires prévus à l’alinéa 46.1(1)a) de la Loi sur les brevets) et la date de délivrance du brevet, moins le nombre de jours à soustraire, compte non tenu du nombre de jours prévu sous le régime des règlements[8].
Le nombre de jours à soustraire en vertu de l’article 46.1(4) de la Loi sur les brevets est la somme de tous les jours inclus dans une ou plusieurs périodes visées à l’article 117.03 (1) des Règles sur les brevets. La liste des périodes est longue[9] et semble viser le nombre de jours que le demandeur aurait pu prendre, en théorie, aux fins de la poursuite de la demande de brevet, mais qu’il ne l’a pas fait. Celles-ci comprennent :
- chaque jour où un examen est reporté[10];
- chaque jour où la demande de brevet est abandonnée[11];
- chaque jour de prorogation du délai au titre du paragraphe 3(1) des Règles sur les brevets[12];
- chaque jour à compter de la date d’un avis d’acceptation[13] ou d’un avis d’acceptation conditionnelle[14] jusqu’au paiement de la taxe finale (à moins que l’avis ne soit écarté ou retiré, ou que la demande ne soit abandonnée);
- chaque jour après la date d’échéance de la taxe pour maintenir les droits en état[15].
Concomitance avec le CPS
La durée du certificat de protection supplémentaire (CPS) court en même temps que toute période supplémentaire de brevet accordée. Plus précisément, la Loi sur les brevets prévoit que la durée d’un CPS prend effet à l’expiration de la durée prévue à l’article 44 de la loi, indépendamment de l’octroi d’une période supplémentaire de brevet en vertu de l’article 46.1 de la loi.
Les dispositions du CPS ne s’appliquent qu’aux brevets relatifs à un ingrédient médicinal ou à une combinaison d’ingrédients médicinaux[16] contenus dans une drogue pour laquelle une autorisation de mise en marché a été délivrée. Toutefois, les dispositions relatives à la période supplémentaire s’appliquent à tous les brevets, peu importe l’objet visé.
Conclusion
Un brevet canadien ne peut bénéficier d’une « période supplémentaire » que s’il est délivré après la dernière des deux dates suivantes : i) cinq ans à compter de la date d’entrée en phase nationale, de la date de soumission ou de la date de dépôt (pour une demande PCT d’entrée en phase nationale, une demande divisionnaire ou toute autre demande, respectivement); et ii) trois ans à compter de la date de la requête d’examen. Bien que les dispositions légales régissant le nouveau cadre d’ajustement de la durée des brevets au Canada soient entrées en vigueur, l’OPIC a indiqué qu’il mettrait à jour son Recueil des pratiques du Bureau des brevets (RPBB), en ce qui concerne les périodes supplémentaires, plus tard en 2025[17].
L’effet des obligations imposées par l’ACEUM en général, et en particulier la mise en œuvre de la « période supplémentaire », sur la réputation du Canada en tant que pays favorable aux brevetés reste à démontrer. À première vue, l’introduction des ajustements de la durée des brevets devrait être perçue comme une évolution positive par les brevetés.
Toutefois, l’efficacité des aspects du régime canadien des brevets qui sont favorables aux titulaires de brevets, tels que l’examen différé, devra peut-être faire l’objet de comparaisons avec leur effet sur les éventuelles périodes supplémentaires.
[1] La Gazette du Canada, Partie I, volume 158, numéro 20, 1247-1290 : Règlement modifiant les Règles sur les brevets et certains règlements pris en vertu de la Loi sur les brevets, en ligne ici.
[2] En ligne ici.
[3] Article 117.01 (1) des Règles sur les brevets.
[4] À l’article 41 de l’annexe 2 – la taxe générale est de 2 500 $ en vertu de la l’article 41 b), tandis que la taxe applicable aux petites entités est de 1 000 $ en vertu de l’article 41 a).
[5] 37 CFR § 1.705; USPTO Manual of Patent Examining Procedure, article 2733.
[6] Article 46.2 de la Loi sur les brevets.
[7] À l’article 8 de l’annexe 2 – la taxe générale est de 1 000 $, tandis que la taxe applicable aux petites entités est de 400 $.
[8] Article 46.1(4) de la Loi sur les brevets.
[9] L’article 117.03 (1) des Règles sur les brevets comporte 38 paragraphes énumérés comme suit : (a) à (z), (z.01) à (z.09), (z.11) et (z.12).
[10] Article 117.03 (1)k) des Règles sur les brevets.
[11] Article 117.03 (1)x) des Règles sur les brevets.
[12] Article 117.03 (1)x) des Règles sur les brevets– « dans le cas où le commissaire proroge un délai au titre du paragraphe 3(1), la période commençant à la date d’expiration du délai original et se terminant à celle à laquelle l’acte pour laquelle la prorogation a été demandée est accompli ou, si elle est antérieure, à la date d’expiration de la prorogation ».
[13] Article 117.03 (1)q) des Règles sur les brevets.
[14] Article 117.03 (1)r) des Règles sur les brevets.
[15] Article 117.03 (1)f) des Règles sur les brevets.
[16] Article 106(1)c) de la Loi sur les brevets.
[17] En ligne ici.
Par Alex Buonassisi, Tilaye Terrefe, Pablo Tseng, et Keith Bird
Mise en garde
Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.
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