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La pause dans la guerre tarifaire : utilisation judicieuse de ce sursis par les entreprises

À la fin de la journée de lundi, le président Trump et le premier ministre Trudeau ont conclu une entente visant à suspendre l’imposition des tarifs de 25 % que chaque pays avait menacé d’imposer. Bien que ce sursis soit le bienvenu, de nombreuses incertitudes demeurent et les entreprises canadiennes doivent continuer à se préparer à la nouvelle date de mise en œuvre des tarifs, fixée au 4 mars 2025.

Nous expliquons brièvement ci-dessous l’étendue des tarifs américains sur les marchandises canadiennes, ainsi que la réponse initiale proposée par le Canada. Nous présentons également des possibilités d’allégement pour les importateurs canadiens advenant l’entrée en vigueur des tarifs sur les marchandises américaines et nous concluons en présentant les mesures d’atténuation des risques que les entreprises canadiennes devraient envisager à l’avenir.

Les tarifs américains sur les marchandises canadiennes

Le 1er février, le président Trump a signé un Décret présidentiel intitulé « Imposing Duties to Address The Flow of Illicit Drugs Across Our Border » (en anglais) (« Décret ») qui a mis en place des tarifs de grande envergure dont l’entrée en vigueur à l’encontre du Canada était initialement prévue le 4 février 2025. Le 3 février, le président Trump a publié un autre décret présidentiel (en anglais) indiquant que l’imposition de ces tarifs sera mise en pause et qu’ils n’entreront pas en vigueur avant le 4 mars 2025. Si aucune modification n’est apportée au Décret, les États-Unis imposeront les tarifs suivants le 4 mars 2025 :

  • 25 % sur toutes les importations en provenance du Canada et du Mexique;
  • 10 % sur toutes les importations d’énergie (y compris le pétrole, le gaz naturel, l’électricité et les minéraux critiques) en provenance du Canada;
  • 10 % sur toutes les importations de la Chine.

La portée du Décret est grande : il prévoit peu d’exceptions[1]; les tarifs s’appliqueront aux importations canadiennes d’une valeur inférieure à 800 dollars (qui sont actuellement en franchise de droits et bénéficient d’un traitement de minimis) et le Décret exclut expressément les drawbacks (soit les remboursements, y compris lorsque les marchandises sont réexportées des États-Unis).

Le plan de représailles tarifaires du Canada

En réponse, le Canada a annoncé son intention d’adopter l’approche en deux étapes qui suit pour imposer des tarifs de 25 % sur des marchandises d’origine américaine d’une valeur de 155 milliards de dollars :

  • Étape 1 (initialement prévue pour le 4 février 2025, sa mise en œuvre est maintenant en pause) : 30 milliards de dollars en marchandises d’origine américaine, notamment le jus d’orange, le beurre d’arachide, le vin, les spiritueux, la bière, le café, les appareils électroménagers, les vêtements, les chaussures, les motocyclettes, les cosmétiques et les pâtes et papiers. Une liste exhaustive des marchandises visées par cette étape sera disponible sur le site Web du ministère des Finances. Le Canada prévoyait mettre en œuvre cette étape au moyen du Décret imposant une surtaxe aux États-Unis (2025).
  • Étape 2 (prévue après la période de consultation) : 125 milliards de dollars supplémentaires en marchandises d’origine américaine importées. Une liste exhaustive de ces marchandises devait être présentée pour une période de consultation publique de 21 jours avant la mise en œuvre des tarifs visant des produits comme les véhicules à passagers et les camions, y compris les véhicules électriques, les produits d’acier et d’aluminium, certains fruits et légumes, les produits aérospatiaux, le bœuf, le porc, les produits laitiers, les camions et les autobus, les véhicules récréatifs et les bateaux de plaisance.

De nombreux ordres de gouvernement, y compris des gouvernements provinciaux et des administrations municipales, ont également annoncé leur intention d’adopter des mesures non tarifaires si les États-Unis continuent d’imposer des tarifs sur les marchandises canadiennes. Ces mesures comprenaient l’interdiction pour les entrepreneurs américains de soumissionner aux marchés publics, le retrait des tablettes d’alcool américain et la réduction des obstacles au commerce interprovincial.

Ce que nous réserve l’avenir – des questions en suspens

  • Les tarifs finiront-ils par entrer en vigueur? Selon le Décret qui suspend les tarifs, cette suspension a eu lieu puisque le gouvernement du Canada a pris des mesures immédiates visant à atténuer la crise de la migration illégale et des drogues illicites au moyen d’actions en coopération. En théorie, le président Trump peut estimer que le Canada a pris des mesures suffisantes pour atténuer la crise à la frontière et pourrait donc atténuer la menace qui justifie les tarifs. Il se peut également que ce va-et-vient de menaces et de négociations se poursuive.
  • Le Canada maintiendra-t-il son approche en deux étapes? Nous ne savons pas si le Canada maintiendra son approche en deux étapes, s’il poursuivra les consultations sur les marchandises supplémentaires qui seront visées par les représailles tarifaires ou s’il mettra en œuvre ces tarifs en une seule fois le 4 mars.
  • Si les tarifs entrent en vigueur, combien de temps seront-ils en vigueur? La date de fin de ces tarifs n’est pas connue. Le président Trump a déclaré que les tarifs demeureront en vigueur jusqu’à ce qu’il soit convaincu que le Canada a répondu de manière suffisante aux préoccupations d’urgence nationale énoncées dans le Décret. Le Canada a clairement indiqué que les tarifs resteront en vigueur jusqu’à ce que le président des États-Unis supprime les tarifs américains sur les marchandises canadiennes. Bien que, en soi, les surtaxes annoncées par le président Trump aient déjà des conséquences importantes au Canada, l’administration américaine a indiqué qu’elle continue d’évaluer (en anglais) d’autres points de pression commerciale, comme des tarifs ciblés sur des biens essentiels comme le cuivre, l’acier et l’aluminium.
  • Les États-Unis vont-ils augmenter leurs tarifs en réponse aux représailles canadiennes? Le Décret comprend une « clause de non-représailles » qui prévoit que les États-Unis peuvent augmenter leurs tarifs si le Canada applique des représailles tarifaires. De plus, comme nous l’avons indiqué dans notre bulletin précédent, le décret intitulé « America First Trade Policy» (en anglais) a lancé une enquête sur les causes des déficits commerciaux des États-Unis et leurs répercussions sur l’économie et la sécurité du pays. L’enquête sera résumée dans un rapport présenté au Président au plus tard le 1ᵉʳ avril 2025 et pourrait donner lieu à d’autres mesures commerciales ou durcissement de la surveillance des importations de la part des États-Unis.

Allégement possible pour les importateurs canadiens : exceptions, drawbacks et décrets de remise

Les entreprises canadiennes qui importent des marchandises d’origine américaine visées par les représailles tarifaires pourraient avoir droit à des allégements.

  • « Origine américaine» : Les représailles tarifaires du Canada ne couvrent que les marchandises « originaires des États-Unis », conformément au Règlement sur la détermination, aux fins de marquage, du pays d’origine des marchandises (pays ACEUM). Par conséquent, il ne suffit pas que les marchandises soient physiquement expédiées depuis les États-Unis ou qu’elles soient détenues par une entreprise des États-Unis. Les marchandises d’origine américaine ont un sens juridique particulier dans cette situation et les entreprises devraient vérifier si les marchandises qu’elles peuvent importer répondent à cette définition juridique concernant l’origine américaine.
  • Exceptions: L’Agence des services frontaliers du Canada (« ASFC ») a publié l’Avis des douanes 25-03 (qui a depuis été archivé) indiquant qu’il existe certaines exceptions à l’application des représailles tarifaires. Par exemple, les surtaxes ne s’appliqueront pas aux marchandises importées temporairement pour être réparées au Canada ou réimportées au Canada après avoir été exportées pour être réparées. Si les tarifs entrent en vigueur, des exceptions pourraient être offertes aux importateurs canadiens qui pourront éviter les droits imposés.
  • Drawbacks: Le même Avis des douanes indiquait que des drawbacks peuvent être offerts pour les importations admissibles. Les drawbacks sont offerts lorsque les marchandises importées sont ensuite exportées en l’état, ou lorsque les marchandises sont utilisées pour produire d’autres marchandises destinées à l’exportation. Les fabricants canadiens qui importent des intrants pour des produits qui sont ensuite exportés du Canada peuvent tirer profit de la procédure de drawback de l’ASFC.
  • Demandes de remise des tarifs: Les importateurs canadiens peuvent demander la remise des tarifs qui s’appliquent aux marchandises en provenance des États-Unis, y compris celles qui figurent sur la liste des mesures de représailles. La remise se distingue du drawback en ce sens qu’elle n’est pas limitée aux marchandises qui sont finalement exportées (que ce soit en tant qu’intrants ou non). Le ministère des Finances a publié un avis décrivant la procédure de demande de remise des tarifs sur les marchandises d’origine américaine. Il y déclarait que la remise ne serait envisagée que dans des « circonstances exceptionnelles et impérieuses ». L’avis a depuis été supprimé, mais il pourrait néanmoins s’agir d’une solution de rechange pour certains importateurs.

Principaux points à retenir et façons dont McMillan et McMillan Vantage peuvent vous aider

Notre équipe a précédemment publié un bulletin intitulé Préparation aux éventuels tarifs américains : dates clés et réflexion stratégique, dans lequel nous avons résumé des mesures d’atténuation clés pour s’y retrouver dans les changements de la politique commerciale avec les États-Unis. Nous avons fourni une liste d’éléments à prendre en compte pour les entreprises qui veulent s’attaquer de façon proactive aux effets des tarifs. Compte tenu des incertitudes, les entreprises canadiennes devraient réfléchir sérieusement aux mesures proactives qui les aideront à surmonter la tempête commerciale :

  • Surveiller les annonces et dates de mise en œuvre principales des gouvernements canadien et américain afin de prévoir toute autre perturbation de vos activités commerciales et d’en évaluer l’ampleur.
  • Discuter avec les clients et les fournisseurs pour préciser la responsabilité en matière de droits de douane, négocier des contrats à plus court terme et éviter de potentiels litiges sur les prix.
  • Examiner les contrats et les Incoterms pour déterminer sans ambiguïté les responsabilités en matière de tarif.
  • Optimiser les accords de prix de transfert afin de réduire les coûts des droits de douane, y compris d’une manière qui réduise la valeur sous-jacente de la marchandise à laquelle le tarif est appliqué.
  • Plaider auprès des gouvernements pour obtenir un soutien financier ou des exemptions.
  • Diversifier les échanges afin de réduire la surdépendance à l’égard du marché américain et préserver les débouchés nationaux.

L’équipe Commerce international de McMillan est à votre disposition pour vous aider à composer avec ces tarifs potentiels et à élaborer des stratégies pour en minimiser l’incidence. McMillan Vantage, un cabinet national d’affaires publiques à service complet, peut vous accompagner dans vos démarches auprès du gouvernement en vue de soutien tarifaire et de mesures d’atténuation.

Veuillez communiquer avec nous pour obtenir de l’aide relativement à l’examen des contrats, à la conformité commerciale ou aux activités de plaidoyer.

[1] Le Décret ne couvre pas les communications postales, télégraphiques, téléphoniques ou autres communications personnelles qui ne nécessitent pas le transfert d’un objet de valeur, certains dons, les importations de matériel d’information ou les importations liées aux voyages (par exemple, les bagages personnels).

Par William Pellerin, Neil Campbell, Jonathan O’Hara, Peter Jarosz, Jamie Wilks, Peter Burn, Philip Kariam, Kathleen Wang, Tayler Farrell, Gray Morfopoulos, Brigid Martin et Courtney Aucoin (stagiaire en droit)

Mise en garde

Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.

© McMillan S.E.N.C.R.L., s.r.l. 2025

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