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Confessions, collaboration et conformité : atténuer les conséquences des allégations de corruption grâce à l’autodénonciation

23 novembre 2021 Bulletin de litige Lecture de 3 min

La GRC a annoncé récemment une hausse des autodénonciations d’entreprises pour corruption. Cette tendance s’observe depuis 2018, année où le Canada a adopté un régime d’accords de réparation (aussi appelés « accords de poursuite différée ») en vertu du Code criminel. À peine quelques jours après l’entrée en vigueur du nouveau régime, la GRC a reçu des aveux de crimes d’entreprise qui ont provoqué l’ouverture d’une enquête. D’autres entreprises ont offert leur collaboration depuis en vue d’obtenir un règlement à l’amiable. Dans le cadre d’un accord de réparation, l’entreprise potentiellement fautive qui a choisi de collaborer peut – au lieu de subir un procès – reconnaître les faits, payer une amende, s’engager à respecter certaines conditions et ainsi éviter une poursuite criminelle.

L’inspecteur Denis Beaudoin (Section des enquêtes internationales et de nature délicate de la Division nationale de la GRC) déclare que plusieurs entreprises canadiennes s’autodénoncent pour montrer leur collaboration proactive, dans l’espoir d’obtenir un accord de réparation clément. Interrogé sur la fréquence des autodénonciations, l’inspecteur Beaudoin affirme que la GRC n’en recevait à peu près jamais avant septembre 2018 (moment où la loi est entrée en vigueur), mais qu’elle en reçoit chaque année depuis[1].

S’autodénoncer pour éviter les condamnations au criminel

Pourquoi s’autodénoncer? Pour éviter les poursuites criminelles. En fournissant des renseignements sur un éventuel crime économique et en collaborant avec les autorités, l’entreprise aide celles-ci à faire cesser les agissements illégaux tout en échappant aux conséquences d’une condamnation au criminel.

Cette montée des autodénonciations s’observe également dans d’autres pays qui ont instauré des régimes de poursuite différée (voir nos textes précédents sur le sujet ici et ici). Au Canada, une condamnation au criminel peut s’avérer onéreuse, au-delà de l’atteinte à la réputation : par exemple, l’entreprise peut être exclue des appels d’offres des gouvernements fédéral et provinciaux. Quant aux accords de réparation, ils peuvent obliger l’entreprise à réformer sa gouvernance, à payer des amendes salées et à continuer de collaborer avec les autorités – tout en évitant les répercussions négatives d’une condamnation au criminel.

Des tendances suspectes à l’origine des enquêtes 

L’inspecteur Beaudoin résume le cas typique : de nouveaux dirigeants regardent les paiements passés, soupçonnent qu’il y a anguille sous roche, puis communiquent avec la GRC. Bien souvent, l’entreprise verse de l’argent à un sous-traitant qui paie un pot-de-vin à un représentant du gouvernement dans le but d’obtenir des contrats gouvernementaux. L’inspecteur Beaudoin précise que la plupart des enquêtes pour corruption de la GRC visent les secteurs des mines, du génie et de la construction.

Des enquêtes plus rapides grâce à l’autodénonciation 

La possibilité de sanctions allégées contribue à réduire considérablement les cas de conduite « intouchable ». Enquêter sur des allégations de corruption nécessite un investissement colossal – temps, argent, main-d’œuvre – de la part du gouvernement.

Même si l’entreprise collabore, explique l’inspecteur Beaudoin, il faudra parfois trois ou quatre ans pour parvenir à une offre d’accord de réparation. Si elle ne collabore pas, ce sera beaucoup plus long. Selon le sergent Guy-Michel Nkili, enquêteur affecté aux dossiers de corruption internationale à la GRC, la collaboration « change le ton de la relation avec la compagnie » et facilite le travail d’enquête, notamment « l’accès à des témoins et à des documents. Sur les mandats de perquisition, les entrevues de témoins, les demandes d’entraide internationales, ça change beaucoup de choses. »[2]

En date du présent bulletin, les procureurs du Service des poursuites pénales du Canada n’ont proposé à aucune entreprise de négocier un accord de réparation. Cela dit, le 23 septembre 2021, les procureurs provinciaux du Québec ont offert un tel accord à SNC-Lavalin inc. et SNC-Lavalin International inc. Les deux entreprises sont accusées de fraude et de complot pour fraude, en vertu du Code criminel, pour des gestes commis entre 1997 et 2004 relativement à la réfection du pont Jacques-Cartier. Ce sont les premières entreprises canadiennes à recevoir une telle invitation.

Appel à l’action de la GRC

La GRC enjoint aux entreprises de s’autodénoncer lorsqu’elles découvrent des cas de corruption. Fait important, elle ajoute que les avocats peuvent lui téléphoner de façon anonyme pour connaître les options offertes aux entreprises qui s’autodénoncent. C’est une méthode presque sans risque pour bien comprendre comment agir dans ce genre de situation.

Le groupe Criminalité économique de McMillan accompagne les entreprises qui envisagent de dénoncer d’éventuels actes de corruption.

[1]Voir Robert Fife et Steven Chase, « RCMP say Canadian companies are now self-reporting allegations of bribery », The Globe and Mail (10 novembre 2021).
[2] Vincent Larouche, « De plus en plus d’entreprises se dénoncent elles-mêmes », La Presse+ (11 novembre 2021).

par Guy Pinsonnault, Jamieson D. Virgin, Chris Scheitterlein et Anika Klassen (stagiaire en droit)

Mise en garde

Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.

© McMillan S.E.N.C.R.L., s.r.l. 2021

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