Les vélos électriques dans un vide réglementaire : comment traiter les rappels?
Les vélos électriques dans un vide réglementaire : comment traiter les rappels?
Le marché des vélos électriques est florissant au Canada, où les fabricants et les détaillants de ces produits, ainsi que les modèles proposés, sont sans cesse plus nombreux. Parallèlement, l’intérêt des autorités de réglementation pour le vélo électrique, aussi appelé vélo à assistance électrique ou bicyclette assistée[1], s’essouffle. À la suite de modifications qui les ont exclus, pour la plupart, de la Loi sur la sécurité automobile (la « LSA ») et du Règlement sur la sécurité des véhicules automobiles (le « RSVA »), administrés par Transports Canada, les vélos électriques sont tombés dans une sorte de vide réglementaire au lieu de passer sous la responsabilité de Santé Canada en vertu de la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation (la « LCSPC »). Dans ces circonstances, on comprendra les fabricants et les détaillants d’être pour le moins déboussolés en cas de rappel d’un de ces produits au Canada.
Transports Canada fait marche arrière
La définition de « bicyclette assistée » ne figure plus au RSVA depuis février 2021. Selon Transports Canada, les caractéristiques suivantes excluent les vélos électriques de l’application de la LSA et du RSVA :
- bicyclettes à pédales classiques assistées d’un moteur à gaz ou électrique;
- vitesse ne dépassant pas 32 km/h.
Certaines caractéristiques de vélos électriques peuvent faire entrer des véhicules appartenant à cette vaste catégorie dans la définition de « véhicule prescrit » au sens de la LSA . Il convient donc de faire un examen approfondi des caractéristiques d’un vélo électrique avant d’envisager de le vendre du Canada. Cela dit, la modification législative a pour l’essentiel retiré les vélos électriques de la réglementation de Transports Canada. Pour déterminer si un vélo électrique est réglementé ou non, Transports Canada tient compte des facteurs suivants :
- la mesure dans laquelle il ressemble à un type de véhicule routier prescrit en vertu de la LSA; si un produit est équipé d’éléments qui ressemblent à ceux des catégories prescrites de véhicules, comme les motocyclettes et les scooters, il sera réglementé comme tel;
- si le produit est destiné à rouler exclusivement hors route et que sa vitesse maximale est de 32 km/h (factuellement ou en raison d’un mécanisme de régulation de la vitesse qui, selon Transports Canada, l’empêche de dépasser 32 km/h), il n’est pas visé par la LSA et le RSVA.
Lorsque le RSVA et la LSA prescrivent des normes de sécurité pour un véhicule, les importateurs doivent donner avis de tout défaut touchant la sécurité ou de toute non-conformité à la réglementation au ministre des Transports du Canada ainsi qu’aux propriétaires des véhicules (sauf si, dans le cas d’une non-conformité, celle-ci est jugée sans conséquence pour la sécurité). Il n’existe toutefois pas d’exigences de déclaration pour les véhicules non réglementés, ce qui signifie que le vendeur d’un vélo électrique « non réglementé » au Canada n’est pas tenu par le cadre réglementaire de Transports Canada de déclarer un éventuel défaut touchant la sécurité.
Santé Canada zigzague
Transports Canada renonçant à réglementer les vélos électriques, cette responsabilité devrait logiquement revenir à Santé Canada, qui administre la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation (LCSPC). Si ce ministère a déjà réglementé les vélos électriques, il refuse actuellement de le faire, soutenant qu’ils pourraient vraisemblablement être utilisés sur la voie publique. Selon son raisonnement, les vélos électriques font partie de la définition de « véhicule » établie par la LSA (malgré la modification législative susmentionnée) et sont donc exclus de la LCSPC en vertu de l’article 7 de l’annexe 1, qui exclut de la compétence de Santé Canada tous les « véhicules » au sens de la LSA.
Ainsi, un vélo électrique peut être un véhicule non réglementé selon la LSA et le RSVA et être quand même considéré comme un « véhicule » par Santé Canada et, donc, ne pas être réglementé par la LCSPC.
Que doit faire un importateur, un distributeur ou un fabricant en cas de rappel?
Santé Canada refusant de les prendre sous sa responsabilité, les vélos électriques tombent dans une zone grise où ni Transports Canada ni Santé Canada n’accepte d’exercer de surveillance relativement à la déclaration des incidents et à la coordination des rappels de produits.
Le bon sens dicte toutefois aux entreprises de faire preuve de vigilance en cas d’incident. Malgré l’absence de surveillance et d’obligation de déclaration, les entreprises devraient suivre les procédures applicables aux rappels et aux correctifs, comme elles le feraient si une autorité de réglementation exerçait une surveillance. Les bonnes pratiques comprennent la publication d’un avis de rappel dans les médias sociaux et sur le site Web de l’entreprise, le suivi des échanges avec les consommateurs au sujet du rappel et le retraçage des produits touchés par le rappel. Ces mesures protégeront les entreprises contre d’éventuelles réclamations en responsabilité du fait du produit et fourniront une bonne défense en cas de poursuite.
Par ailleurs, rien n’empêche une entreprise de déclarer un problème lié à un vélo électrique à Transports Canada et à Santé Canada dans le seul but de leur faire confirmer par écrit que le produit ne relève pas de leur compétence. Comme c’est souvent le cas, les entreprises socialement responsables récolteront plus tard les fruits de leur bonne conduite.
Un mot sur la surveillance provinciale
Chaque province a sa propre loi qui réglemente les vélos électriques et les définit selon des critères comme la puissance, le pédalage assisté, la taille des roues et la vitesse. Ces réglementations fixent aussi les exigences applicables aux vendeurs et aux utilisateurs des produits (homologations, hauteur du siège, casques, code de la route, assurance, etc.). Plusieurs ont été élaborées en fonction de la définition de « bicyclette assistée » qui a maintenant été retirée du RSVA, et elles pourraient bientôt être mises à jour. Il est conseillé de prendre connaissance des réglementations fédérales et provinciales applicables aux fabricants, aux détaillants et aux utilisateurs avant d’importer et de vendre des vélos électriques au Canada.
[1] À noter que cette catégorie ne comprend pas les bicyclettes équipées d’un moteur à combustion interne.
par Lindsay Lorimer, Rachel Cooper et Timothy Cullen
Mise en garde
Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.
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