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Le partage de propriété et l’investissement immobilier fractionné

19 avril 2022 Bulletin sur les marchés des capitaux Lecture de 5 min

Aperçu 

Les fonds de capital-investissement immobilier et les fiducies de placement immobilier (« FPI ») sont depuis longtemps les instruments de placement de choix pour les portefeuilles immobiliers en Amérique du Nord. Mais il y a un nouveau venu sur le marché : les plateformes de « propsharing » (pour « property sharing », littéralement le « partage de propriété »), qui permettent à des investisseurs (surtout des particuliers) d’acheter une fraction du droit de propriété d’un bien immobilier. Les seuils d’investissement minimal peu élevés rendent ce nouvel instrument particulièrement attrayant pour les Z et les millénariaux du Canada, qui peinent à acheter dans un marché immobilier en surchauffe. Il s’en dégage aussi un sentiment d’appartenance et un esprit de communauté, des qualités mises de l’avant dans les sites Web et les documents promotionnels de ces plateformes. Voilà une autre preuve de l’essor du secteur de la technologie immobilière au Canada, que nous avons exploré dans une série de trois bulletins : partie 1, partie 2 et partie 3.

L’attrait

Le partage de propriété et l’investissement immobilier fractionné offrent de belles possibilités. Pour les gestionnaires de fonds d’actions de petites et de moyennes sociétés et de fonds de capital-investissement, il s’agit de mettre en marché des actifs immobiliers qui ont fait leurs preuves sous une nouvelle forme facilement négociable. De leur côté, les particuliers peuvent, à un prix abordable, accéder à un type d’investissement qui aurait autrement été hors de leur portée, choisir un à un les biens dans lesquels ils veulent investir (plutôt que d’investir dans un portefeuille préconstitué) et sentir qu’ils font partie d’une communauté en ligne d’investissement direct.

La structure 

Ceux qui font affaire avec les sociétés de partage de propriété choisissent le ou les biens qui les intéressent et acquièrent directement des parts dans chacun d’entre eux (et non une participation déterminée dans un portefeuille réunissant plusieurs biens, comme ceux qui investissent dans des fonds de capital-investissement, des fonds immobiliers et des FPI). Contrairement aux FPI, qui peuvent théoriquement émettre un nombre infini de parts, les entités de partage de propriété s’en tiennent généralement à un nombre fixe, pour que les investisseurs sachent exactement quelle portion de chaque bien leur appartient et ne voient pas cette portion diluée. Les quelques entités du genre à avoir fait leur entrée sur le marché canadien jusqu’ici sont des sociétés en commandite et des sociétés par actions. Contrairement aux parts de FPI, les unités de participation dans ces entités (actions dans une société par actions ou parts dans une société en commandite) ne sont pas des « placements admissibles » pour les régimes enregistrés comme les REER et les CELI au sens de la Loi de l’impôt sur le revenu. Pour en savoir plus au sujet des FPI, consultez notre bulletin Considérations pratiques pour la structuration d’une FPI fermée.

Le partage de propriété est certes bien différent des autres modes d’investissement que nous avons mentionnés, mais certaines de leurs caractéristiques se recoupent. Ce sont des gestionnaires qui s’occupent de repérer les biens à acheter, de faciliter les acquisitions et de gérer les biens acquis (quoique, aux États-Unis, certaines entités de partage de propriété permettent aux investisseurs de choisir des biens à acheter). Ils récoltent des honoraires pour l’acquisition, la gestion et l’aliénation des biens.

Dispense de prospectus pour financement participatif et dispense d’inscription 

Puisque le partage de propriété implique de mobiliser des capitaux auprès d’un grand nombre d’investisseurs, les autorités canadiennes en valeurs mobilières considèrent les entités qui le font comme des entreprises de courtage, ce qui signifie que leurs titres doivent être placés par un courtier en valeurs mobilières inscrit ou un courtier sur le marché dispensé, ou faire l’objet d’une dispense. L’entité peut s’inscrire elle-même comme courtier ou retenir les services d’un tiers inscrit.

Pour réaliser des placements, les FPI fermées s’appuient généralement sur les dispenses relatives à l’« investisseur qualifié » et à la « notice d’offre » prévues dans le Règlement 45-106 sur les dispenses de prospectus (le « Règlement 45-106 »), et les fonds de capital-investissement se prévalent de celle relative à l’« émetteur fermé ».

Si les dispenses visant l’investisseur qualifié et la notice d’offre permettent le placement de titres, le partage de propriété se prête aussi très bien à une dispense de prospectus rarement utilisée, soit celle pour le financement participatif (la « dispense pour financement participatif »), et à la dispense de l’inscription à titre de courtier (la « dispense d’inscription ») pour les portails qui facilitent les placements en ligne réalisés par des émetteurs qui utilisent la dispense pour financement participatif, le tout étant prévu au Règlement 45-110 sur les dispenses de prospectus et d’inscription pour financement participatif des entreprises en démarrage (le « Règlement 45-110 »).

Le régime de dispenses de prospectus applicable au financement participatif en place avant l’entrée en vigueur du Règlement 45-110 en juin 2021, sous lequel les dispenses étaient accordées par des décisions générales des provinces, était rarement employé. Tout d’abord, les montants maximaux des placements (pour chaque investisseur et au total) étaient peu élevés. De plus, les coûts associés à la mobilisation de capitaux (création d’un portail ou adhésion à un portail existant, honoraires de courtiers et d’avocats) étaient plutôt élevés compte tenu de ces montants maximaux.

Au contraire, le partage de propriété, la dispense pour financement participatif et la dispense d’inscription forment un tout harmonieux. Premièrement, la mobilisation de capitaux pour un projet de partage de propriété est faite auprès d’une grande communauté d’investisseurs qui, pour la plupart, souhaitent investir de petits montants dans un même bien. Sous le régime du Règlement 45-110, les émetteurs peuvent réunir jusqu’à 1,5 M$ sur 12 mois, sous réserve du respect de certains critères. Les investisseurs peuvent investir au plus 2 500 $ par placement, ou 10 000 $ lorsqu’un courtier inscrit indique que le placement est convenable. Deuxièmement, l’une des principales caractéristiques de l’investissement immobilier fractionné est que tout se fait via une plateforme en ligne. Contrairement aux entreprises ayant pignon sur rue qui cherchent à réunir des capitaux à l’aide d’un portail en ligne, le portail relève de l’essence même de ce nouvel instrument, qui cible des habitués des technologies souhaitant investir à partir d’une interface en ligne conviviale et accessible. Troisièmement, si sa création nécessite une grosse dépense initiale, le portail est une excellente plateforme pour mobiliser ultérieurement des capitaux à un coût minime par abonné. Quatrièmement, d’un point de vue purement marketing, le partage de propriété et le financement participatif sont des concepts émergents et novateurs qui attirent l’attention des médias et des investisseurs.

Il convient de noter que les émetteurs qui utilisent la dispense pour financement participatif peuvent aussi se prévaloir des dispenses plus classiques (investisseur qualifié et notice d’offre, notamment) pour dépasser la limite de 1,5 M$ en 12 mois, de même que travailler avec des courtiers en valeurs inscrits et des courtiers sur le marché dispensé pour mobiliser des capitaux ailleurs que sur leur portail. Autrement dit, la dispense pour financement participatif peut être vue comme une occasion de récolter de modestes fonds pour un projet en particulier, ou comme un outil de marketing qui contribue à une mobilisation plus importante.

Actions, parts et… jetons? 

En plus des titres de participation classiques (actions d’une société par actions, parts d’une société en commandite), les entités de partage de propriété peuvent émettre des jetons virtuels à l’aide de la chaîne de blocs. Ces jetons sont adossés à la valeur des biens immobiliers sous-jacents, et les revenus sont versés dans les portefeuilles électroniques dans lesquels ils sont stockés.

Les jetons permettent aux investisseurs d’obtenir plus facilement des liquidités, puisqu’ils peuvent être négociés entre pairs, tant que les exigences des lois applicables en matière de valeurs mobilières sont respectées. Les jetons et le partage de propriété, qui ont déjà pris leur envol aux États-Unis, n’en sont qu’à leurs premiers pas au Canada. Cela dit, des infrastructures, dont des plateformes dûment inscrites, permettent déjà de réaliser ce type de placement.

Si vous avez des questions concernant la structuration, la mobilisation de capitaux ou l’inscription à titre de courtier dans le contexte d’une entité canadienne de partage de propriété, les membres du groupe des marchés des capitaux de McMillan seront heureux de vous aider.

par Alex Bruvels et Jeffrey Gebert

Mise en garde

Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.

© McMillan S.E.N.C.R.L., s.r.l. 2022

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